AFRO SAMURAI : ANALYSE D'UNE SÉRIE ANIMÉE
AFRO SAMURAI : ANALYSE D'UNE SÉRIE ANIMÉE

NB : Attention cet article révèle tout ou partie de l'histoire.


Titre de la série : Afro Samurai

Titre original : Afuro Samurai

Réalisation : Kizaki Fumitomo

Auteur : Takashi Okazaki

Studio d'animation : Gonzo

Cible éditoriale : Seinen manga

Genres : Chambara/Science-fiction

Durée : 26 minutes

Nombre d’épisodes : 5

Pays : Japon

Année de diffusion au Japon : 2007

Chaîne de TV : Fuji Television

Année de diffusion en France : 2010

Chaîne de TV : Paris Première

Synopsis : Voir détail des épisodes.

 

PROBLÉMATIQUE

Malgré ses apparences (violence, gore, agressivité, originalité du personnage), la série « Afro Samurai » est-il un programme authentiquement japonais qui prodigue l’idéologie du « guerrier véritable » ?

Démarche : Malgré son aspect physique, prouver que le personnage est un véritable guerrier dans la plus pure tradition du Japon médiéval.

Axes d’étude : Histoire de l’audiovisuel au Japon (voir article sur Blog de Phoebe), la philosophie du guerrier zen.

 

LE PERSONNAGE PRINCIPAL

Caractéristiques du personnage d’Afro samurai

Personnage protagoniste, anti-héros exprimant la passivité : le héros n’est désormais plus que le personnage principal d’une trame, qui subit plutôt les événements plus qu’il ne les détermine. L’indifférence pour autrui à travers son obsession : la vengeance de son père.

Un personnage se comprend grâce à l’image (aspect physique, fréquence d’apparition, actions, etc.), mais également par le son (les dialogues, ce qui est dit de lui et la manière dont on le dit). Certaines séries utilisent même la musique pour caractériser les personnages.

 

LES PERSONNAGES SECONDAIRES/ANTAGONISTES : ARCHETYPES

Le Bandeau n° 1 : le tyran et le salaud (personnage central, antagoniste).

Les 7 sans âmes : le hors-la-loi, le génie du mal, le sadique, le parasite.

Otsuru/Okiku : l’amie d’enfance, la séductrice, la mère nourricière, l’hypocrite, la stratège, la guerrière repentie.

Gino : Le meilleur ami, le guerrier, l’âme d’une vengeance non justifiée.

Les autres personnages (guerriers et combattants) : hors-la-loi, tyrans, bandits de grand chemin et autres traîtres en tous genres.

 

EPISODE 1

Ouverture : Le père d’Afro détient le bandeau n°1 mais il est tué au cours d’un combat contre le personnage qui détient le bandeau n°2. Depuis ce jour, Afro Samurai n’aura de cesse de vouloir venger la mort de son père.


L’incipit se présente comme un flash-back qui permet au téléspectateur de comprendre la situation initiale, ainsi il apprend pourquoi Afro est devenu un puissant guerrier.

La deuxième séquence fait état d’un présent dans lequel Afro, arrivé à l’âge adulte, doit se confronter à de nombreux adversaires.

Afro Samurai apparaît comme un personnage calme et imperturbable. Il possède le bandeau numéro 2, bandeau délaissé par l’actuel n°1, ce qui l’oblige à se confronter et à combattre une horde de combattants avides de posséder ce fameux bandeau.

Au cours du premier combat de l'épisode (qui n’est pas son premier combat), Afro est encerclé par de nombreux adversaires, ce qui ne l’empêche pas de rester impassible. Il possède ce qu'on appelle « l’esprit d’étincelle », qui est un état d’esprit où il n’existe aucun intervalle, son sabre devenant celui de ses adversaires. Le but principal est d’éviter l’attachement de l’esprit, ce qui lui permet de remporter le combat.

Afro est un guerrier impartial, doté d’une dextérité incomparable (il combat sous un ciel de pleine lune). Tsukuyomi no mikoto est le dieu de la lune et de la nuit dans le shintoïsme et dans la mythologie japonaise. Il représente la création mentale et psychologique. Cela permet de conserver une profonde sensibilité du coeur et de l'esprit, avec une attitude mentale de paix, de respect et de sérénité.

Le dernier adversaire pensait qu’Afro n’était qu’un guerrier légendaire, un de ces guerriers sorti tout droit d’un conte fantastique pour faire peur aux enfants. Mais il est bien réel, « un démon qui ose se dresser face à dieu ».

Mais que cherche Afro ? Veut-il remettre le monde dans le droit chemin ? Pour Afro, ce combat ne signifie rien de personnel mais juste une vengeance, rien de plus.


Afro est un personnage solitaire et silencieux, poursuivit depuis sa plus tendre adolescence par son ego, qui apparaît comme une « entité » bavarde, grossière, peureuse mais qui semble garder une certaine raison. D’ailleurs, il lui pose la question de l’humanité : « Resterait-il un brin d’humanité dans ce grand corps de Noir ? »

L’esprit d’Afro est un esprit affûté qui sait scruter la nature des choses. C’est l’esprit du guerrier zen ou « vraie substance spirituelle », encore appelée « corps spirituel permanent ». Et cet esprit n’est pas dupe. Il est imperturbable et maître des choses.

 

Le bandeau n°2 est un objet très convoité dans le mode des guerriers.
La réputation d’Afro le précède. Il a assassiné la totalité de la « Guilde de l’Ouest » et il est considéré comme une des plus fines lames du monde. C’est un tueur sans pitié qui est capable d’éliminer plusieurs ennemis en seulement cinq mouvements de sabre. D’ailleurs, certains guerriers préfèrent prendre la fuite rien qu’en entendant son nom.

 

Pourquoi certains guerriers poursuivent Afro Samurai ?

C’est une légende vivante que tout le monde connaît dans le pays. Depuis très longtemps, il existe deux bandeaux : le n°1 et le n°2. Si une personne porte le bandeau n°1, cette dernière est considérée comme l’égale de dieu et personne ne peut la défier, excepté celui qui porte le bandeau n°2.

Le problème du n°2 est que n’importe qui à travers le monde peut venir le défier. Ainsi, la vie d’un n°2 est un perpétuel combat, mais le chemin du guerrier le mène toujours quelque part, car la récompense ultime est qu’il peut lui-même devenir le n°1, c’est-à-dire, dieu.

Afro Samurai est un guerrier vrai détenteur de la Voie, car les guerriers de la Voie sont des adeptes qui se doivent de pratiquer courage et volonté et de cultiver l’énergie (le ki). Il apparaît comme un guerrier invulnérable. Les hommes de la Voie sont des hommes capables de transcender les choses car ils possèdent un cœur ferme et un esprit stable.

L’ego d’Afro : c’est une entité très bavarde qui semble souvent parler pour ne rien dire, d’ailleurs Afro n’a de cesse de lui dire de « fermer sa gueule ». Cependant, il n’hésite pas à le prévenir du danger mais cet ego n’est pas courageux pour deux sous. Cette entité, c’est le « moi » d’Afro, celui qui fuit devant le combat, qui a peur et qui s’affole pour un rien. Il est flatteur, grivois et ne connaît pas grand-chose dans l’art du combat.

Afro samurai possède un esprit libre qui lui permet de s’adapter à chaque situation. Il ne s’attache à aucun point particulier, il est comparable à l’eau, il ne s’attarde en nul endroit. L’esprit foncier ou l’esprit sans pensée est un état qui permet de dépasser la fixation, qui équivaut à un esprit illusoire.

Afro est doté d’un esprit droit, autrement dit, d’un esprit authentique qui a atteint l’omniprésence. Cet esprit s’étend dans le corps tout entier, il ne s’attache à aucun point précis, ce qui lui permet d’obtenir la victoire à chaque combat.
L’esprit foncier est une chose très importante et essentielle que le guerrier zen doit posséder. Cela lui permet d’obtenir des qualités d’équilibre propres à cet esprit, d’où émane l’action spontanée qui libère les inhibitions engendrées par l’ego.

 

Dans la vie quotidienne, nous sommes persuadés que, pour survivre, nous avons besoin de nous identifier à tout ce que nous faisons et à tout ce que nous avons, qu’il s’agisse d’objets que nous possédons ou de personnes. C’est la survie du « moi », autrement appelé l'ego.

 

L'ego d'Afro tient à sa vie et surtout à sa survie, et par conséquent, il s'identifie à la forme qui est celle d'Afro samurai. Mais pour ce dernier, il n'est nullement question de survie mais de vengeance.

« Un cœur authentique n’a pas besoin d’explication. L’esprit foncier ne tergiverse pas ».

Afro possède un esprit clair, c’est l’esprit originel, il est maître de sa propre vie, il possède une conscience sans entrave. Même touché ou blessé, Afro continue le combat et il est prêt à se battre jusqu’au dernier souffle.
Dans la série, il est souvent question de combat face à la mort et quand cela devient une question de vie ou de mort pour l’ego d'Afro, et c’est généralement le cas pour pas mal de gens, cette entité s'affole et prend peur.

 

EPISODE 2

Ouverture : Le jeune Afro a récupéré le bandeau n°2, délaissé par l’adversaire de feu son père, ainsi que le sabre de ce dernier. Il apparaît comme un petit garçon impétueux et courageux, voire téméraire, n’ayant pas conscience du danger. Ce qu'il souhaite, c'est venger la mort de son père. Malgré son jeune âge et son inexpérience, il affronte des adversaires devant lesquels il essuie une défaite outrageante. Il ne recule devant rien mais l’échec est assuré.

Montage alterné : la relation est faite entre le dernier combat d’Afro dans l’épisode 1, où Afro se retrouve gravement blessé et son deuxième combat, où il s'est fait hélas dérober le bandeau numéro 2, quand il était jeune garçon. Là aussi, gravement blessé, il rencontre Otsuru et Gino, deux orphelins recueillis par une école d’arts martiaux qui enseigne et pratique l’art du sabre.

Présent : Afro adulte reçoit l’hospitalité et les soins d’Okiku, une guerrière ninja qui reconnaît en Afro toute la puissance du guerrier : « Qui d’autre qu’un samouraï aurait pu se cramponner à son arme sans jamais la lâcher, alors qu’il était plongé dans une semi-inconscience ».

Passé : Le jeune Afro gravement blessé est recueilli et soigné par le maître de l’école de sabre où il n’y a que des orphelins. C’est dans cette école qu’Afro va apprendre l’art du sabre. Les élèves s’activent à biner la terre tout en écoutant les leçons et les conseils du maître : 

« Découvrez la terre par vous-même, cognez-la, frappez-la. Comment pourriez-vous manier une arme si vous ne savez pas creuser un trou ? »

Le maître apprend à ses disciples ce que l’on appelle « l’état de sans pensée » qui est assimilé à un espace de liberté fluide. Cet état est différent de l’absence de pensée qui est perçue comme une forme d’indifférence.

Présent : L’ego d’Afro semble lui coller à la peau. Cette entité est parfois sans vergogne, moqueuse, salace et pleutre, qui aime les bonnes choses de la vie. Afro ne lui répond jamais, il l’ignore complètement car cet ego lui encombre l’esprit.

Passé : Le maître enseigne à ses disciples des notions d’entre-aide et de partage.

Présent : Afro pratique la méditation, certainement à la recherche de l’esprit libre ce qui permet d’engendrer un processus de guérison. Contrôler les pouvoirs liés à la stabilité mentale (joriki) afin de cultiver la concentration (zenjo), telle est la technique pour éradiquer les maladies de l’esprit.

Okiku continue de prendre soin d’Afro…

Passé : Le jeune Afro s’entraîne avec les autres élèves. Armé d’un bokken (ou bokuto), il débute son apprentissage dans l’art du sabre. Mais le jeune Afro a l’esprit troublé par la vengeance et le cœur remplit de haine. La perte de son père l’a beaucoup affecté. Il apprend par le plus grand des hasards qu’une personne détient le bandeau n°2. Il se met alors à la poursuite de cette personne et pour cela il n’hésite pas à tuer, aveugler par la colère. Obnubilé par la mort de son père ainsi que par son assassin, il apparaît apeuré et écœuré par ses instincts meurtriers.

Présent : Afro adulte continue de méditer, ce qui lui permet de faire le discernement entre l’éveil et l’égarement. Le bushidô caractérise l’idée du guerrier calme et imperturbable, véhiculant le concept de maturité, de sobriété et de sérénité face à la mort. Afro ne s’accorde pas une seule seconde pour penser. Sans cesse, il est concentré sur la situation, il est prêt à agir, ce qui lui permet d’avoir le geste juste.

Il possède la conscience éveillée, il détient l’intuition, qui est une chose très importante car elle déclenche la réaction du corps et de la technique, ainsi le corps et la conscience s’unissent.

 

« Shin » (l’esprit), « Wasa » (la technique), « Taï » (le corps), ces trois éléments doivent être unis et constituent un ensemble idéal permettant l’acte juste.

 

Passé : Le maître du dôjô réprimande le jeune Afro en lui disant que la vie d’un n°2 n’est qu’une existence d’assassin : « Les hommes sont nés pour vivre, certainement pas pour tuer », lui dit-il.

Afro doit briser ce lien qu’il entretient avec la vengeance afin de se libérer de ce cycle infernal qui pollue son esprit. Mais il est hanté par l’esprit de son père et est encore trop jeune pour le comprendre. Il est apeuré par l’esprit illusoire. Afro apparaît déjà comme un guerrier qui n’a pas froid aux yeux et qui ne recule pas devant la mort. Il est déterminé à venger son père et il n’est pas prêt d’arrêter la lutte. Or dans les arts martiaux, japonais comme chinois, il est toujours question d'arrêter la lutte et il est toujours question de non violence.

Possédant une dextérité innée, il combat sans se soucier de sa propre vie, tout aussi jeune qu’il apparaît. Même sans son sabre, il réussit à vaincre son adversaire avec l'aide des autres élèves de l’école.

Mais être un guerrier n’est pas une chose aisée car si on sort une arme de son fourreau, il faut être prêt à mourir. Le jeune Afro veut tuer le n°2 et en fait une affaire personnelle.

Présent : Afro adulte s’entraîne durant la nuit dans la forêt.

« Un cœur simple et honnête passe par la demeure sacrée de l’esprit ».

Afro samurai est un guerrier pur et honnête. Il saisit d’instinct ce que l’on ne voit pas, voit chaque chose avec précision et prête attention au moindre détail. Il comprend les aspects positif et négatif de chaque chose. Il feint l’ignorance tout en gardant la raison. Il inspire le respect, et est peu loquace.

Okiku est en fait une espionne à la solde des « Sept sans âme », chargée de récupérer des informations pompées dans la mémoire d’Afro, à travers ses rêves.

 

Quand il ne fait rien, Afro médite, sans cesse importuné par son ego qui le taquine et le pousse vers de mauvaises inclinations sous prétexte n’en vouloir que pour son bien. Mais Afro n’est pas dupe même face à son ego, il conserve le juste milieu. Il semblerait qu’Afro n’aime pas son ego, car il n’a de cesse de l'évincer.

Okiku ne cesse, elle aussi, de flatter et de séduire Afro, mais encore une fois, ce dernier n’est pas dupe. Même quand il s’abandonne aux plaisirs de la chair, Afro reste vigilant, car comment Okiku aurait pu avoir cette immense cicatrice qui traverse son dos, si ce n’était une guerrière.

Démasquée par Afro, Okiku semble vouloir se faire pardonner, mais il est trop tard car les sbires des « Sept sans âme » ont déjà encerclé la maison. Ils s’en prennent à Afro, détruisant tout sur leur passage et tuant par la même occasion Okiku, qui n’est autre qu’Otsuru, qui devait siphonner le cerveau d’Afro pour récupérer ses techniques de combat. Hélas, les « Sept sans âme » ont récupéré les données qu’Otsuru leur a communiquées.

 

EPISODE 3

Ouverture : Le jeune Afro manie les armes avec beaucoup de dextérité, hélas ses yeux le trahissent. Le maître d’arme d’Afro lui enseigne l’importance du regard. Selon le maître, il faut devenir imprévisible et savoir laisser parler son subconscient. Laisser ses mouvements couler naturellement de l’essence même de son être. Telles sont les paroles du maître d’Afro.

 

D'après Taisen Deshimaru, « il faut penser avec le corps, avec l’instinct, avec l’intuition, on peut tout ressentir. Ressentir les moindres vibrations est une chose tout à fait possible. Sentir le moindre geste de ceux qui sont autour de soi, car il est possible de voir avec les yeux de la conscience ».

Présent : L’ego d’Afro est toujours aussi bavard et toujours aussi moqueur. Quant à Afro, il reste silencieux et finit par menacer son propre ego s’il ne se tait pas. Les « Sept sans âme » sont toujours à la poursuite du bandeau n°2, ce pour quoi, ils pourchassent sans relâche Afro Samurai afin de le détruire. Le frère n°1 présente une arme absolue qui, semble-t-il, arrivera à bout de l’actuel n°2. C’est une machine qui a été construite à l’image d’Afro en vue de combattre le n°1. Des informations enfouies dans l’inconscient ont été extraites par Okiku alias Otsuru, via les rêves d’Afro. Ce dernier semble être une âme tourmentée par la mort de son père ce qui apparaît comme le principal leitmotiv de sa quête.

L’Afro-droïde est une performance technologique. L’homme ou la machine ? Combattre son reflet, ne pas penser. Afro fait face à l’Afro-droïde : ici, il est fait référence à une règle essentielle du budô qui consiste à trouver et à apprendre la maîtrise de soi-même, en se combattant soi-même, car c’est le seul combat qui est valable.

Afro Samurai se doit d’être imprévisible car le droïde qui se trouve en face de lui possède la même technique. C’est alors que les paroles de son maître raisonnent dans sa tête : « Même l’adversaire le plus redoutable ne peut rien faire contre l’imprévu, face à ce qui sort de nulle part, sans référence. Les mouvements créés par sa propre essence ne peuvent appartenir qu’à soi-même, ceux qui peuvent vous surprendre vous-même ».

Afro n’écoute jamais son ego et il a raison. Il se rend dans le domaine des « Sept sans âme » et applique la fameuse Voie du guerrier dispensée par Sun Tzu dans « L’Art de la guerre » :

« Par la colère, plonge-les dans le désarroi. Par l’humilité, plonge-les dans l’orgueil. Par la fuite, épuise leurs forces, sème la division en leur sein. Prends-les au dépourvu, déplace-toi dans l’inattendu. Sois subtil jusqu’à l’invisible, sois mystérieux jusqu’à l’inaudible, alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires ».

Ayant éliminé les sept frères, il reste encore à éliminer l’Afro-droïde, machine programmée pour le tuer, qui s’avère être une machine coriace. Ce combat se déroule dans les cieux, au-dessus des nuages, c’est un combat spirituel, voire divin, où il n’y a aucune place pour la pitié.

 

EPISODE 4

Après avoir éliminé les « Sept sans âme », Afro se retrouve confronté à un ours en peluche droïde, qui se trouve être en fait, Gino, son frère quand il était à l’école des orphelins. Dans un premier temps, Afro refuse le combat et essaye de prendre la fuite, mais l’ours en peluche continue de le poursuivre. Afro reste inconscient devant l’attaque de l’ours, c’est alors qu’il entend la voix de l’ancien maître retentir dans son esprit (en voix off).

Passé : « Premièrement, la force et la vitesse seules ne suffisent pas pour tuer un adversaire. Tue ton ennemi dans un seul mouvement avec calme et puissance. Deuxièmement, seule l’action compte. Frapper sans réfléchir est la seule voie pour tuer l’ennemi. Dans un duel, le but est de tuer son ennemi, c’est tout. Les mouvements, les arabesques, les démonstrations sont totalement inutiles. La seule posture, c’est qu’il ne faut pas avoir de posture. Ta façon de manier ton arme dépend de la relation avec ton adversaire, du terrain sur lequel tu l’affrontes et de la situation. S’il se fait océan, fais-toi montagne. S’il se fait montagne, alors fais-toi océan. Il faut toujours garder cette règle à l’esprit. Lorsqu’on se bat réellement, l’ennemi n’est pas coopératif, il ne reste pas statique. Même un coup de travers peut handicaper votre adversaire, empêcher ou réduire à néant l’attaque suivante ».

 

Pour Taisen Deshimaru, « Si la force, « shi sei » : la forme et la force, est parfaite, le mouvement qui la suit le devient aussi. Cela se sent bien dans le tir à l’arc, qui enseigne la façon juste de se comporter : une belle posture, la solitude intérieure, l’esprit libre, l’énergie (le ki) équilibrée entre le cosmos, l’être et la puissance du corps, une respiration correcte concentrée sur le « hara », la conscience attentive, claire ».

 

Gino se bat avec deux sabres car s’il doit combattre plus d’ennemi, c’est mieux. Il considère ce style comme étant utile. Cela rappelle la technique des deux sabres de Miyamoto Mushashi (Cf. Traité des Cinq Roues).

Afro semble être à la recherche du n°2.

« Il faut se battre, vivre et manger comme si c’était notre dernier jour ».

Le bruit court qu’un certain maître d’armes qui dirige un dôjô pour orphelins, possèderait le bandeau n°2. Afro est devenu un grand guerrier et veut savoir si son maître est réellement le numéro 2. Ce dernier lui répond par un rendez-vous donné pour un duel.

Le maître d’Afro pensait qu’il allait emporter son secret dans sa tombe. Par conséquent, il lui impose un choix : « soit il oublie sa vengeance, soit il se bat contre son maître jusqu’à la mort pour prendre le bandeau n°2. Si Afro devient le vainqueur, il ne connaîtra plus l’amitié, plus de joie, plus d’amour. Seule la violence meurtrière guidera son cœur, car le bandeau n°2 incite les hommes à vouloir prendre le pouvoir à celui qui détient le n°1 ».

Le maître lui présente cela comme un fardeau, car telle est la destinée de celui qui porte le bandeau n°2.
Les élèves de l’école tentent en vain de séparer la maître et le disciple mais d’autres guerriers guettent et attendent eux aussi leur heure pour récupérer le fameux bandeau n°2.
Afro a choisi sa voie, toujours obnubilé par la mort de son père et par la vengeance qui l’anime, il finit par tuer son maître. Désormais, Afro ne connaîtra plus jamais le repos, il a récupéré le bandeau n°2.
Gino ne pardonnera jamais à Afro son acte. C’est à ce moment précis que l’ego d’Afro apparaît. Ce dernier lui déconseille d’ailleurs de porter le bandeau n°2.

Présent : L’ours-droïde est ce qu’il reste de Gino et ce dernier compte bien venger la mort du maître d’armes ainsi que celle de tous les élèves de l’école.


EPISODE 5

Afro mène un combat à mort contre son ancien compagnon à l'école du sabre, Gino, qui désire se venger de la mort de son maître d’armes. Afro est en mauvaise posture. L’ego d’Afro se définit comme étant son « animal de compagnie ». Il encourage tout de même Afro à continuer le combat en lui disant qu’il ne sert à rien d’avoir des regrets. Afro est perçu par son ego comme étant un « chien enragé ayant des convictions ». Il faut qu’Afro avance et il doit finir ce qu’il a commencé, il doit atteindre son objectif. Devant ce choix cornélien, Afro doit éliminer son ancien ami, qui n’a maintenant plus rien d’humain. Si son ennemi utilise deux sabres, il se doit d’en faire deux fois plus. Il doit bouger deux fois plus vite pour pouvoir gagner. Selon Afro, la force des coups est deux fois plus puissante quand on tient son arme avec les deux mains.
Afro n’a jamais écouté son ego et c’est ce qu’il lui a permis de remporter, jusqu’à présent, tous ses combats. Même son ego n’y pourra rien. Afro a enfin détruit son ego qui le quitte à jamais : « C’est ici que nos routes se séparent », dit-il, satisfait d’avoir pu faire un bout de chemin avec ce guerrier hors du commun.

Gino-droïde semble déterminé plus que jamais à tuer Afro. Pour lui, « contre n’importe quel combattant possédant deux lames, la puissance intrinsèque qui est en lui devrait gagner ».

Mais Gino n’est pas un combattant humain, il possède la vitesse, la grâce et une puissance bien plus supérieure que celle d’Afro. Ce dernier se décide enfin à dégainer son sabre. La colère de Gino a décuplé sa puissance mais les raisons de combattre Afro vont bien au-delà de posséder le bandeau n°2. Gino veut se venger et pour cela il est devenu une machine à tuer.
Afro est grièvement touché et la vie a fait de lui un tueur, mais il se doit de gagner ce combat, car Gino ne constitue qu’un obstacle de plus pour atteindre son objectif. Afro réussit à le vaincre, mais il lui reste encore à combattre le n°1, qui est considéré comme l’égal de dieu. Afro ne désire pas tuer le n°1 pour posséder le bandeau mais bien pour venger la mort de son père. Il ne s’intéresse ni au pouvoir, ni à la puissance, ce n’est pas un personnage avide de pouvoir : il possède un but, mais il est dénué de profit.

Devant le n°1, Afro reste impassible. Le n°1 a eu le temps de voir évoluer Afro : ce dernier a grandi et est devenu un excellent tueur, car tel est le destin de celui qui porte le bandeau n°2. Le n°1 pense qu’Afro est encore vulnérable, il est comme son père, il est encore « trop gentil ». Le père d’Afro voulait dissimuler le bandeau n°1 aux yeux du monde, mais tout ce qu’il est arrivé à faire, c’est d’attiser la convoitise et les délires de puissance des gens.

« La mort fait fureur et ces simples bandeaux peuvent rendre les hommes cinglés ».

Les hommes cherchent juste à s’entretuer mais personne ne sait comment régner sur le monde. Un ouragan de chaos et de tuerie sans aucun contrôle sont les seules notions que possède l’homme. La puissance absolue doit-elle conduire vers la paix définitive ?

« Le pouvoir n’est rien si on ne l’utilise pas correctement ».

Le n°1 considère que c’est un péché de ne pas savoir gouverner le monde quand on a la chance d’être investi d’une grande puissance.

« Le monde court à sa perte. Tout n’est que chaos et souffrance ».

Pour le n°1, il est temps que quelqu’un prenne le contrôle. Il est temps qu’un homme utilise sa puissance absolue pour assurer une paix définitive. Il est temps qu’un homme débarrasse le monde de ces guerres incessantes et permettent à tous les êtres humains, jeunes et vieux, de vivre dans la tranquillité. Il est temps pour que l’homme se comporte en dieu, là où dieu a échoué.

Le n°1 a pris la tête du guerrier unique, craint pour sa sublime technique, celle du père d’Afro. Le n°1 est resté au sommet du mont Shumi, où un secret ancestral lui a été révélé. Acquérir le bandeau n°1 ne suffit pas. Ce n’est pas une coïncidence si Afro n’a plus de père, d’ami ou de maître. Le destin a désigné le n°1 pour posséder tous les bandeaux. Posséder le premier bandeau n’est rien, ce qu’il faut, c’est les avoir tous. C'est alors que l’ultime force pourra être accordée par un mystère qui dépasse l’entendement. Le père d’Afro le savait. Il voulait empêcher l’actuel n°1 de connaître cette vérité. Le n°1 veut acquérir tous les bandeaux pour diriger le monde et enfin devenir dieu.

Un combat à mort s’engage alors entre Afro et le n°1 qui semble posséder des pouvoirs surnaturels. Afro arrive à bout du n°1 mais c’est oublier que « même la tête coupée, un samouraï se doit d’accomplir une dernière action » (Cf. Hagakure).

« La colère rageuse d’Afro n’est qu’une gouttelette de sang dans cet océan de violence assassine qui inonde le bandeau meurtrier. Il n’y a ni début, ni fin… juste la force brutale et la mort. Il n’y a que les maudits comme Afro et le n°1 qui peuvent tolérer cette pénible vérité ».

Dans un dernier élan, le n°1 arrive à toucher Afro. Mais il semble avoir crié victoire un peu trop rapidement, dans sa quête incessante à vouloir devenir dieu.
Dans un dernier souffle d’énergie, Afro découpe en morceaux le n°1 et récupère pour le coup le bandeau n°1. Ainsi, Afro est éclairé par une lumière divine.

Est-ce cela la vérité ultime ?

 

CONCLUSION

La figure de l'anti-héros

C’est une figure romantique ou théâtrale souvent opposée au héros traditionnel dont elle ne possède ni la témérité dramatique, ni l’aveuglement passionnel, ni l’acceptation héroïque des souffrances et châtiments.

L’anti-héros subit la sanction qui résulte d’un concours de circonstances, d’une erreur d’appréciation, de sa situation marginale.

Archétype du personnage principal

Afro Samurai est un anti-héros représentant l’archétype de l’âme perdue et du guerrier solitaire.

 

Problématique initiale

Malgré ses apparences (violence, gore, agressivité, originalité du personnage), la série « Afro Samurai » est-il un programme authentiquement japonais qui prodigue l’idéologie du « guerrier véritable » ?

Concernant l'esthétique de l'image et la pertinence du récit, la série s'incrit plus dans une cible éditoriale du style « gekiga » que dans celle du « seinen ». Le terme « gekiga » signifie littéralement « dessins dramatiques », « geki » signifiant « drame » au sens premier du terme grec, avec l'idée de violence, de force et d'intensité.

Par ailleurs, il suffit de regarder le premier épisode de la série pour s'apercevoir, que les images regorgent de nombreux plans gores, au sein desquels le sang coule à flot et que la représentation de la mort y est omniprésente.

Il ne fait aucun doute que cette série diffuse les principes du Bushidô, qui est la voie du guerrier zen. Le personnage d'Afro Samurai dépasse les frontières nippones par son aspect physique mais reste néanmoins l'archétype du guerrier samouraï tel qu'il existe dans l'imaginaire collectif japonais.

Plus qu'un anime violent et sanguinaire, ce programme diffuse l'art du combat tel que l'ont décrit et pensé de nombreux samouraïs et maîtres d'arts martiaux. Pour s'en rendre compte, il suffit de lire le « Traité des Cinq Roues » de Miyamoto Mushashi, « L'esprit indomptable » de Takuan Soho ou encore « Le Sabre de vie » de Yagyû Munenori.

Plus qu'un simple programme de divertissement, Afro Samurai est une série qui amène à se poser de réelles questions sur plusieurs choses : Qu'est-ce qu'un samouraï ?Qu'est-ce que l'esprit ? Qu'est-ce que la méditation ? Qu'est-ce que la concentration ? Mais surtout qu'est-ce que la vie et la mort ?

C'est aussi des questions que je m'étais posé il y a maintenant quelques années. Peu à peu le chemin s'éclaire, et j'ai pu trouver des réponses grâce aux nombreuses recherches ainsi qu'aux nombreuses lectures que j'ai pu avoir jusqu'à présent. C'est par ailleurs ce qui m'a également amené à en savoir plus sur le confucianisme, sur le taoïsme ainsi que sur le bouddhisme. Car finalement, tout est intimement lié.

 

Qu'est-ce que l'esprit ?

Certaines personnes pensent que l’esprit est le cerveau ou bien une autre partie ou fonction du corps, mais c’est une erreur. Le cerveau est un objet physique et on peut le voir avec les yeux.
L’esprit n’est pas un objet physique. On ne peut pas le voir avec les yeux car c'est quelque chose d'impalpable. Par conséquent, le cerveau n’est pas l’esprit, mais simplement une partie du corps.
Il n’y a rien dans le corps qui puisse être identifié comme étant notre esprit, parce que notre corps et notre esprit sont des entités différentes. L'esprit peut alors être comparé à ce que les maîtres japonais appellent le ki : le souffle-énergie.

Dans les écritures bouddhistes, notre corps est comparé à une auberge et notre esprit à un hôte qui y séjourne. Lorsque nous mourons, notre esprit quitte notre corps et s’en va vers la vie suivante, tout comme un hôte quitte une auberge pour aller ailleurs. C'est ce que nous appelons dans la religion judéo-chrétienne l'âme.

L'esprit, c’est donc un continuum qui n’a pas de forme et dont la fonction est de percevoir et de comprendre les objets. L’esprit est par nature sans forme et non physique.
Il est très important d’être capable de distinguer les états d’esprit paisibles de ceux qui ne le sont pas. Les états d’esprit qui troublent notre paix intérieure, tels que la colère, la jalousie et l’attachement désirant, sont appelés « perturbations mentales », et c'est ce qui constitue les causes principales de toute notre souffrance.

Yagyû Munenori en parle d'une façon très juste dans son livre « Le sabre de vie » : il conseille d'ailleurs de rassembler toutes ces perturbations mentales et de les éliminer en une seule fois, grâce à l'entraînement à un art martial mais également grâce à la méditation et zazen. C'est ce que raconte Taisen Deshimaru dans son livre « Zen & Arts martiaux ». C'est un exercice difficile mais qui vaut le coup d'être pratiqué, mieux que toute psychanalyse, c'est un bon moyen de trouver le bonheur et le calme de la paix intérieure.

L'entraînement à une respiration calme, lente et profonde peut amener à la concentration de l'esprit. Une concentration pure aide aussi à rendre notre esprit et notre corps confortables, flexibles et faciles à utiliser dans la pratique du dharma, c'est-à-dire dans la pratique bouddhiste. L’aisance qu’il y a alors à utiliser l’esprit est appelée « souplesse », c’est l’un des principaux bienfaits apportés par la concentration, issue de la méditation.

« L'esprit du guerrier zen ou vraie substance indescriptible ou corps spirituel permanent est un esprit qui n'est pas dupe. Il est imperturbable et maître des choses. On appelle ces guerriers, « vrais détenteurs de la Voie ». Les adeptes de la Voie se doivent de pratiquer courage et volonté et de cultiver, grâce à l'énergie (le ki), l'invulnérabilité afin d'éviter les afflictions mentales. Les hommes de la Voie sont des hommes capables de transcender les choses en possédant un coeur ferme et un esprit stable ».

 

Qu’est-ce que la concentration ?

Savoir se concentrer, c’est mettre son ki, son énergie vitale, dans une seule action à la fois. L’entraînement de la concentration permet de pouvoir se concentrer sur une seule chose à la fois, tout en étant conscient de tout ce qui se trouve autour de soi. Il est donc nécessaire de se concentrer toujours sur un seul point.
Dans les arts martiaux, il faut se concentrer sur les yeux, ce qui n’empêche pas de ressentir le moindre mouvement de l’adversaire. La concentration, c'est en fait la pratique de la respiration dans l'ici et maintenant.

 

Comment mourir, comment vivre ?

La voie du sabre, le kendo, posait sans cesse cette question, c’est pour cela qu’il se rapprochait de la voie et retrouvait l’esprit du Zen.
Le combat n’a rien à voir avec une simple compétition mais rejoint plutôt la plus haute philosophie : l’art de vivre et de mourir.

 

Qu’est-ce que la vie, qu’est-ce que la mort ?

Si l’on veut vraiment vivre, il faut connaître la mort en soi. La vie est une succession d’ici et maintenant et il est essentiel de savoir se concentrer sans cesse, dans l’ici et maintenant. Il faut résoudre la contradiction en soi, la contradiction portée par notre cerveau, contradiction qui se retrouve dans toute notre vie familiale, sociale et intérieure. Il faut donc apprendre à se libérer de notre ego, de notre « moi » étriqué.

Le seul moyen de résoudre cette contradiction, c’est « hannya » : la sagesse. La sagesse possède deux visages ; un côté sévère et froid, un autre côté, bienveillant et compatissant.


Il est possible de voir les cinq épisodes d'Afro Samurai en français sur Youtube.
Voir également le long-métrage : Afro samurai : resurrection, également visible sur Youtube.


Bibliographie & Sources :
Zen & Art martiaux
L'esprit indomptable - Takuan Soho
Le Sabre de vie - Yagyû Munenori
Traité des Cinq Roues - Miyamoto Mushashi
Le confucianisme, le taoïsme, le bouddhisme, le shintoïsme.
 

AFRO SAMURAI : ANALYSE D'UNE SÉRIE ANIMÉE
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