L'univers de Tim Burton # 9

CHAPITRE 12

En 2001, Tim Burton réalise le remake de La Planète des Singes.

L'univers de Tim Burton est incontestablement un assemblage entre animation et cinéma irréaliste dont découle un onirisme caractéristique composés de mondes enchantés. Utilisant les perspectives pour s'éloigner du réel, le cinéaste ne cesse de jouer avec la profondeur de champ afin de valoriser les décors.

L'oeuvre de Burton a la particularité de refuser les conventions en usant d'une mise en scène raffinée. Sa filmographie démontre son aversion pour l'asepsie et les lieux communs ainsi qu'une certaine empathie à l'égard des phénomènes de foire.

Tim Burton : "[...] J'ai toujours eu l'impression qu'ils étaient mal perçus alors qu'ils possèdent souvent plus d'âme que les humains qui se croient normaux. [...]"

La vraie spécificité du cinéma de Burton tient en l'éloge de la différence.

Le roman

La Planète des Singes est un roman français de science fiction, écrit par Pierre Boulle. Ce livre fait état d’un conte dystopique décrivant une civilisation imaginaire. Une dystopie s’oppose à une utopie qui au lieu de présenter un monde parfait, propose un monde désenchanté. Ce style littéraire est très utilisé par certains auteurs de science fiction, définissant bien souvent une dictature sans égard pour les libertés fondamentales.

L’histoire

En l’an 2500, le professeur Antelle organise une expédition spatiale afin d’explorer l’étoile Bételgeuse stiutée dans la constellation d’Orion. A bord du vaisseau, trois personnes et un chimpanzé vont repérer la planète Soror, ressemblant étrangement à la Terre. Surpris de découvrir des traces de pas humains, leur surprise ira en grandissant lorsqu’ils comprendront que cette planète abrite une civilisation de singes évolués et intelligents, tandis que les hommes n’en sont qu’au stade primitif où ils sont traités comme des esclaves…

Le livre de Pierre Boulle est certainement un parti pris malin et audacieux qui permit à son auteur de porter un regard critique sur les comportements humains mais aussi sur les rapports entre les élites et le peuple.

Les adaptations cinématographiques

Planet of the Apes est un film de science fiction américain réalisé en 1968 par Franklin J. Schaffner et une première adaptation de l’œuvre de Pierre Boulle.

Synopsis : En 1972, un engin spatial américain s’écrase sur une planète de la constellation d’Orion. Les trois survivants découvrent une tribu d’humains primitifs soumis à l’esclavage par un peuple de singes très intelligents et dotés de la parole.

Le thème sous-jacent du scénario est celui de la Guerre Froide et de la hantise d’une catastrophe nucléaire. Le personnage principal comprend qu’il est revenu sur Terre après que vingt siècles se soient écoulés. D’autres thèmes y apparaissent tels que l’asservissement de l’être humain ainsi que la critique de la société de consommation. Dans le livre de Pierre Boulle, le héros retourne sur Terre pour découvrir que la race humaine a également été supplantée par la civilisation simiesque.

La portée philosophique du livre indique que l’être humain ne se détruit pas lui-même mais il en émerge une certaine fatalité qui amène les singes à être supérieurs aux hommes.

Le film est moins misanthrope, certainement pour des raisons philosophiques, mais témoigne plutôt d’un certain anthropocentrisme.

En 1970, Ted Post réalise Le Secret de la Planète des Singes (Beneath the Planet of the Apes), suite logique d’un premier opus. L’histoire est basée se passe en 3955 où une mission est chargée de retrouver les survivant de la précédente navette spatiale, mais le vaisseau s’écrase sur la planète des singes. L'unique survivant découvre que la planète abrite également une race de mutants humains adorateurs de la bombe atomique. Ces derniers ont élu domicile dans une cité souterraine, la "Zone Interdite"…

Entre 1971 et 1973, trois autres films seront réalisés sur la même idée de départ, mis à part qu’ils constituent des préquelles à la version datant de 1968 :

·         Les Evadés de la Planète des Singes (Don Taylor, 1971), titre original : Escape from the Planet of the Apes

·         La Conquête de la Planète des Singes (J. Lee Thompson, 1972), titre original : Conquest of the Planet of the Apes

·         La Bataille de la Planète des Singes (J. Lee Thompson, 1973), titre original : Battle for the Planet of the Apes

En 1974, une série télévisée fut réalisée, indépendante aux cinq films précédents. Faute de succès, la série ne comportera qu’une seule saison de quatorze épisodes.

Le remake de Tim Burton

Bien que reprenant la version de 1968, le remake de 2001 semblerait être beaucoup moins subversif, même si les thèmes de l’esclavage et de la guerre en restent les principaux sujets.

Synopsis : En 2029, au cours d’une mission spatiale, le capitaine Leo Davidson se retrouve pris dans une tempête électromagnétique qui le propulse en l’an 3002. Son vaisseau s’écrase sur une planète nommée Ashlar. Capturé avec d’autres humains, il y découvre une planète habitée par des singes doués et dotés de la parole…

Tim Burton réalise un conte philosophique et souhaitait se détacher de la version originale.

Tim Burton : "[…] La première règle lorsqu’on aborde un remake, c’est de ne jamais tenter de plagier ou de reproduire un chef d’œuvre. […]"

L’un des sujets abordés dans le film, comme dans la version de 1968, semble être l’esclavage.

L’exploitation de l’homme par l’homme

L’esclavage désigne la condition sociale d’un homme non libre et non rémunéré qui est juridiquement la propriété d’une autre personne et négociable au même titre qu’un objet. Au sens large, l’esclavage est un système socioéconomique reposant sur le maintien et l’exploitation des personnes. En France, il est reconnu comme étant un crime contre l’humanité depuis 2001 (seulement !). Par extension, l’esclavage est la condition de ceux qui sont soumis à une tyrannie ou à une autorité arbitraire. Au sens figuré, il désigne un état de dépendance à une chose dont on ne peut se passer ou par métonymie, à quelque chose qui suggère un abus. L’esclavage existe depuis l’Antiquité jusqu’au 20^ème siècle. Concernant l’abolition de l’esclavage, il existe plusieurs dates officielles selon les pays, cependant les situations d’asservissement restent toujours une question d’actualité à travers le monde…

L’exploitation de l’homme par le singe

Les Hommes ont de tous temps montré un penchant pour asservir ses congénères. Durant l’Histoire, l’Homme s’est cru autorisé à réduire ses semblables en esclavage sous prétexte d’une différence de religion ou de couleur de peau.

La Planète des Singes présente l’être humain soumis par des singes évolués. Comment réagiraient les hommes s’ils se retrouvaient privés de leur liberté physique ou mentale ? Bien avant ce film, le cinéma a exploré cette voie à travers la science fiction.

En 1960, George Pal s’inspire du roman d’H. G. Wells, La Machine à remonter le Temps, où il décrit une humanité divisée en deux camps : les Elois, êtres sereins, insouciants et pacifistes et les Morlocks qui ont la particularité de réduire les premiers en esclavage et de s’en servir comme nourriture.

La science fiction des années 80/90 "semble avoir oublié combien peut se révéler inquiétant le fait que toute expérience vécue, dont nous sommes persuadés de la réalité, peut n’être qu’un tatouage photographique gravé dans une mémoire".

Trois films viennent enrichir cette thématique : dans Blade Runner (Ridley Scott, 1982), les humains manipulent la mémoire des androïdes afin de les asservir dans des colonies extérieures. Dans Dark City (Alex Proyas, 1998) et dans Matrix (Andy et Larry Wochowski, 1999), les esprits manipulés sont ceux d’êtres humains, soumis à leur insu par des formes de vies extérieures.

Source :

L'écran fantastique - Hors série - été 2001

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