Distribution géographique des langues slaves

LA MYTHOLOGIE SLAVE

La mythologie slave est l’ensemble des croyances cosmologiques et religieuses des peuples slaves avant leur évangélisation. Elle partage avec les cultures celte, germanique, grecque et persane les mêmes schémas. L’arrivée et l’expansion du christianisme font disparaître certains éléments de cet ensemble et en transforment d’autres.

Les spécialistes disposent de très peu de documentation permettant d’étudier la mythologie slave. Les croyances et les traditions religieuses auraient été avant tout de tradition orale, transmises entre les générations puis oubliées au cours du temps après la christianisation.

Les mythes se retrouvent au sein du folklore, des légendes, des contes, des chansons, des proverbes et surtout de l’exorcisme, pratique encore courante dans certains pays slaves.

Les Slaves colonisaient d’immenses espaces couverts de forêts et de marais, de lacs et de cours d’eau. Ils étaient pêcheurs, éleveurs et agriculteurs. Les petits groupements familiaux se sentaient impuissants devant les forces extrêmes de la nature : le mystère du jour et de la nuit, le changement des saisons, les tempêtes et les orages, le débordement des eaux, la succession des bonnes et des mauvaises récoltes.

L’ancien Slave était soumis à la domination des forces mystérieuses de la nature. Pour comprendre ces phénomènes naturels, il personnifiait cette dernière par de nombreuses divinités.

C’est ainsi qu’il s’est formé peu à peu une mythologie commune à tous les peuples slaves, mythologie parfaitement adaptée aux conditions liées à l’environnement et au quotidien.

A Kiev et sur le littoral de la mer Baltique (sur l’île de Rugen), on retrouve une hiérarchie plus ou moins définie des divinités supérieures. Néanmoins, la mythologie slave reste vague et imprécise.

 

PANTHÉON DES DIVINITÉS SLAVES

Les dieux Bielobog et Tchernobog, « dieu blanc » et dieu noir »

Il existe dans la mythologie slave un dualisme qui trouve sa source dans l’opposition de la lumière, force vivifiante, et des ténèbres, force destructrice. Cette opposition a donné naissance à deux images divines que l’on retrouve chez les peuples de la branche occidentale du monde slave : Bielobog et Tchernobog.

Tchernobog, un dieu noir, le dieu des ténèbres et de la nuit, et, Bielobog, un dieu blanc, le dieu de la lumière et du jour. Un dieu du mal et un dieu du bien, opposés l’un à l’autre.

D’après certains témoignages écrits, les « volkhvy », personnes mi-prêtres, mi-sorciers de l’ancienne religion slave, disaient : « Il y a deux dieux : l’un en haut et l’autre en bas ».

Volkhv ou Volkhv ou Wołchw en polonais, peut se traduire par sage, sorcier, mage. Ce terme désigne un prêtre dans les anciennes religions slaves ainsi que dans la foi slave autochtone contemporaine.

A l’époque moyenâgeuse, les volkhv sont attestés parmi les Rus’. A cette période, les volkhv possédaient des pouvoirs mystiques, notamment la faculté de prédire l’avenir.

La Russie blanche ou Ruthénie blanche désigne différentes régions de l’Europe de l’Est, notamment et plus couramment, c’est le nom donné à la Biélorussie.

Dans ce pays, il existe Bieloun, un être divin qui apparaît sous les traits d’un vieillard à barbe blanche vêtu de blanc. Il ne se montre que le jour et n’agit que pour le bien.

 

COSMOGONIE

Culte du ciel, Être Suprême

Le Slave polythéiste considérait le ciel comme un être suprême, qu’il personnifiait sous la forme du dieu Svarog. Ce dernier donna naissance à deux enfants : le Soleil, dénommé Dajbog, et le Feu, appelé Svarogitch, littéralement « fils de Svarog ». Le Ciel est donc le père de tous les autres dieux. Selon un vieux mythe slave, les ruraux gardent encore un respect mystique pour le feu, qui a toujours un caractère sacré.

Svarog by Andrey Shishkin

Un culte au Soleil

D’après les mythes et les légendes slaves, le Soleil habite en Orient, dans un pays de l’éternel été et d’abondance. C’est là que s’élève son palais d’or d’où le Soleil part le matin, sur son char lumineux, attelé à des chevaux blancs à l’haleine de feu, pour faire le tour de la voûte céleste.

Dans un conte populaire polonais, le Soleil se promène sur un char de diamants, à deux roues, attelé de douze chevaux blancs aux crinières d’or.

Dans une autre légende, le Soleil habite en Orient, dans un palais d’or. Il fait sa route dans une char attelé à trois chevaux : un cheval d’argent, un cheval d’or et un cheval de diamant.

Chez les Serbes, le Soleil est un roi jeune et beau. Il habite un royaume de lumière, il est assis sur un trône d’or et de pourpre. A ses côtés, se trouvent deux belles vierges : Aurore du matin et Aurore du soir, sept juges (planètes) ainsi que sept « messagers » qui volent à travers l’univers, sous l’aspect des « étoiles à queue » (comètes). Est présent « l’oncle chauve » du Soleil, « vieux Messiatz », soit la lune.

Dans les légendes populaires russes, le Soleil possède douze royaumes. Il habite à l’intérieur de l’astre solaire, et ses enfants sont les étoiles. Ils sont servis par les « filles solaires » qui les baignent, les soignent et leur chantent de belles chansons.

Le mouvement diurne du Soleil sur la sphère céleste est représenté dans certains mythes slaves comme le changement de ses âges. Le Soleil naît chaque matin, fait son apparition en bel enfant, atteint sa maturité vers midi et meurt, le soir, en vieillard. Le mouvement annuel du Soleil est expliqué d’une façon analogue.

Certains mythes et certaines légendes slaves donnent une interprétation anthropomorphique des rapports entre le Soleil et la Lune. Bien que Messiatz soit du genre masculin en slave, beaucoup de légendes représentent cette divinité comme une jeune et belle jeune femme que le Soleil épouse au début de l’été pour s’en séparer en hiver, jusqu’au retour du printemps.

Le divin couple Soleil-Lune a donné naissance aux Étoiles. Quand ce couple est de mauvaise humeur et ne s’entend pas bien, un tremblement de terre se produit.

Le Dieu-Soleil, Dajbog, grande divinité du jour et de la lumière, vainqueur des ténèbres, du froid et de la misère, est devenu synonyme de bonheur. Les destinées humaines dépendent de lui. Il est juste. Il punit les mauvais et récompenses les bons. Ce qui renvoie à un concept de rétribution des âmes.

Représentation du dieu-soleil Dajbog

Des divinités des vents, du tonnerre et de la foudre

Dans la mythologie slave, il existe plusieurs dieux des vents. Le vent d’Ouest se nommait Dogoda, divinité associée à l’amour et à la bonté. Dans certaines légendes, les vents sont au nombre de sept.

Au sein de plusieurs tribus slaves, il existe l’adoration d’un dieu des vents, nommé Stribog. Il est aussi question d’un dieu des vents nommé Warpulis, qui faisait partie de la suite du dieu Peroun et provoquait le bruit de l’orage. Erisvorch était le dieu de la tempête sacrée. La consonnance de ces derniers noms est plutôt d’origine lituanienne ou germano-scandinave.

La première mention écrite de la mythologie des Slaves est Procope de Césarée qui, au 6ème siècle, dans son Bellum Gothicum, décrit les croyances de certaines tribus des Slaves du Sud qui avaient franchi le Danube. Selon lui, ces Slaves auraient été monothéistes et se rattachaient à un dieu unique nommé Péroun.

Péroun ou Péroune ou Perun est, dans la mythologie slave, le dieu de l'orage et du tonnerre. Il a aussi été appelé Piorun, en Pologne. Dodola, déesse de la pluie, est parfois considérée comme son épouse. Dans la mythologie lituanienne, il est associé à Perkun ou Perkūnas.

Perkūnas en lituanien, en letton Pērkons, en vieux prussien Perkūns, est le dieu du tonnerre et le dieu le plus important du panthéon balte. Dans les mythologies lithuanienne et lettonne, il est aussi identifié comme le dieu de la pluie, des montagnes, des chênes et du ciel.

Représentation du dieu Perun by Andrey Shishkin

La Chronique des temps passés est la plus importante source concernant la mythologie slave. Compilée en langue slave au 12ème siècle, elle fait référence et inclut la copie de documents plus anciens. Deux dieux, Péroun et Vélès, sont mentionnés dans le traité de paix signé au début du 10ème siècle, entre l'empereur byzantin et les chefs païens des Slaves orientaux.

Le panthéon est ainsi décrit : Péroun, dieu de la foudre et de la guerre, Dajbog, dieu du temps, des intempéries et de la durée, Stribog, dieu du vent, Khors, dieu du soleil, Simargl, dieu-griffon du feu, de la nuit, de la lune, des récoltes et des plantes et Mokoch, déesse de la fécondité.

Ce tableau caractérise la période finale des Slaves, dans une culture de type héroïque et déjà féodale. La religion politique y prédomine.

Vélès ou Volos est un des dieux les plus anciens dans la mythologie slave. Il est le fils de Rod, le frère de Khors et l’époux d’Azovouchka, fille de Svarog et de mère Sva. Avec son épouse, il habite sur l'île magique Bouïane.

Vélès, aussi appelé Svantovit ou Weiha, est le dieu de la guerre, du bétail, de la richesse, protecteur des marchands, des chasseurs et des agriculteurs. Les anciens Slaves avaient l'habitude, pendant les récoltes, de « friser la barbe » — les derniers épis des moissons étaient liés sans les couper en formant une barbe, en l'honneur de Vélès dont le nom signifie « chevelu ».

Vélès est aussi le dieu de la Lune et le frère du Soleil. Après la mort, les âmes montent le long du rayon de la lune vers le portail où elles sont accueillies par cette divinité. Les âmes pures continuent leur chemin vers le soleil sur ses rayons, et les autres restent avec Vélès, sur la lune pour se purifier ou être renvoyées sur terre où elles se transforment en humains ou en esprits.

Dieu Vélès by Andrey Shishkin

L’île magique Bouïane

Dans la mythologie slave, Bouïane est une île légendaire de la Mer océane, qui a la capacité d'apparaître et de disparaître à volonté. Trois frères y vivent : le Vent du Nord, le Vent d'Ouest et le Vent d'Est. Il s'y passe nombre d'évènements étranges.

Le monolithe de Piatra Neamt évoquait un Arbre-Monde nommé AminDer, un concept cosmologique existant au sein de la mythologie slave. Le monolithe de Varsovie invite à explorer le concept d'au-delà dans la mythologie slave.

 

L’AUTRE-MONDE DES ANCIENS SLAVES

Il est question d’un lieu mythique nommé Iriy ou Vyrai ou Vyriy où « les oiseaux volent pour l’hiver et les âmes vont après la mort », qui est parfois identifié au Paradis. Le printemps arrivait sur Terre en provenance de Vyrai.

Selon Andrzej Szyjewski, spécialiste des religions, ethnologue et professeur de sciences humaines polonais, au départ, les premiers Slaves ne croyaient qu’en un seul Vyrai, lié à la divinité connue sous le nom de Rod. Ce lieu était apparemment situé loin au-delà de la mer, à la fin de la Voie lactée.

Rod est le premier de tous les dieux slaves. Il est le père de tout ce qui vit et existe. Il est considéré comme le Créateur de l’univers et des autres divinités. Il a organisé trois mondes qu’il a séparé les uns des autres : Jav, Prav et Nav. Rod préside à la destinée des êtres humains avec Rojanice, sa parèdre cocréatrice de l’univers. Il envoie les âmes sur la Terre quand les enfants naissent.

  • Jav est le monde matériel, le monde visible, le monde terrestre.
  • Prav est la loi de Svarog qui régit Jav et Nav.
  • Jav est contenu dans Nav, le monde immatériel, le monde invisible mais également le pays des morts. Svarga, le royaume des dieux, fait partie de Nav.
Représentation du dieu Rod by Andrey Shishkin

Nav est une expression utilisée pour désigner les âmes des morts dans la mythologie slave. La forme singulière (Nav ou Nawia) est également utilisée comme nom pour désigner un monde souterrain, sur lequel le dieu Vélès veille. Selon le folklore ruthène, Vélès vivait dans un marais au centre de Nav, où il était assis sur un trône d’or au pied de l’arbre cosmique, brandissant une épée. Symboliquement, Nav a également été décrit comme une immense plaine verte, un pâturage, au sein duquel Vélès guide les âmes. Selon les croyances, les âmes renaissaient plus tard sur terre.

Selon les fables folkloriques, les portes de Vyrai étaient gardées par Vélès, qui prenait parfois la forme d'un faucon ardent, tenant dans ses griffes les clés des autres mondes.

Vyrai a souvent été imaginé comme un jardin au-delà d’une porte de fer qui empêchait les vivants d’entrer, situé dans la couronne de l’arbre cosmique. Les étoiles étaient considérées comme les âmes des morts. Les branches étaient censées être nichées par les oiseaux, qui étaient identifiés comme des âmes humaines.

La reconstruction étymologique du mot, soutenue par des croyances préservées, permet de relier l’Iriy aux idées slaves les plus anciennes sur l’autre monde, qui se trouve sous terre ou au-delà de la mer, où le chemin se trouve à travers l’eau.

Les peuples slaves polythéistes pensaient que les oiseaux qui s’envolaient vers Vyrai pour l’hiver et revenaient sur Terre pour le printemps, étaient des âmes humaines. Les cigognes transportaient des âmes à naître de Vyrai vers la Terre. Selon certains contes populaires, l’âme humaine quitte la Terre pour Vyrai lors de la crémation. Cependant, elle ne reste pas éternellement au Paradis. Cette âme peut revenir pour quelques temps sur Terre.

Boris Andreïevitch Ouspenskij, né en 1937 à Moscou, linguiste, sémioticien et historien de la culture russe, après avoir analysé le vaste matériel ethnographique sur Iriy, a conclu que « Iriy ou Vyrai » est une désignation générale de l’autre monde.

 

A SUIVRE : Monolithe de Varsovie : La mythologie lituanienne

Sources, cartes et photos : Wikipédia - Merci et Gratitude

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