Entre les murs
27 août 2010
Réalisation : Laurent Cantet
Genre : Comédie dramatique
Durée : 2h08
Année de production : 2008
Date de sortie : 24 septembre 2008
Distribution : Haut & Court
Récompense : Palme d'or Cannes 2008
5 nominations pour les César 2009
Site officiel : www.entrelesmurs-lefilm.fr
Synopsis :
François est un jeune professeur de français dans un collège difficile. Il n'hésite pas à affronter Esmeralda, Souleymane, Khoumba et les autres dans de stimulantes joutes verbales, comme si la langue elle-même était un véritable enjeu. Mais l'apprentissage de la démocratie peut parfois comporter de vrais risques.
Résumé de l'article paru dans "Première Magazine" - Septembre 2008, écrit par Isabelle Danel.
Trois bonnes raisons de voir le film :
1. Humour omniprésent, vivacité de la langue et des échanges, mauvaise foi équitablement répartie.
2. La classe comme si vous y étiez avec cette envie bouillonnante d'en découdre avec le prof.
3. S'il y a échec de l'éducation, il est dans les deux camps.
Entre les murs n'est ni un documentaire, ni une fiction, le film se situe entre les deux, il est une adaptation libre du livre de François Bégaudeau, qui n'est ni un essai, ni un roman mais plutôt à mi-chemin entre les deux.
Un professeur, une classe, quatre murs, vingt-quatre élèves, vivant pendant une année dans un collège classé en Zone d'Education Prioritaire (ZEP) dans le XXème arrondissement de Paris.
Dans ce monde clos que chacun de nous connaît ou a connu, Laurent Cantet nous en donne à la fois une vision synthétique et ouverte. Il a gardé du texte initial l'essentiel et a su récréer une ambiance nécessaire aux improvisations dans le cadre d'ateliers théâtre.
Au fil du temps, de ce groupe de vingt quatre adolescents assidus, il en ressort des "caractères". Les improvisations sont induites plutôt que dirigées par François Bégaudeau, coauteur du film, ex-prof, écrivain, journaliste et acteur à part entière.
Les joutes verbales sont brillantes et les élèves d'une vivacité encourageante, le prof maniant la langue avec une ironie mordante et une certitude qui le fait parfois déraper.
Gentil pas gentil ? Compétent et foutraque, tolérant et injuste, sûr de son bon droit et en proie au doute. Comme ses élèves, comme tout le monde !
Portrait d'une humanité plurielle et imparfaite, état des lieux d'une démocratie à traiter avec vigilance, Entre les murs est un film plein, dense et qui questionne le monde.
Extrait de l’article paru dans Studio Ciné-Live (anciennement Studio Magazine - Septembre 2008)
Entre les murs : La Palme d'Or 2008 nous ouvre les portes du quotidien d'une classe de collège. Il y a des films comme ça, tournés dans un coin de collège d'un quartier périphérique d'une ville française et dont la portée, pourtant est universelle.
L'attribution de la Palme d'Or à Entre les murs par un jury international l'a montré avec éclat. Le film de Laurent Cantet (cf. Ressources humaines, Vers le Sud), chronique tragi-comique d'un collège sensible, dit avant tout une époque, la nôtre, où la foi de charbonnier dans l'école, l'autorité des maîtres, des adultes, du savoir général, sont battues en brèche par l'explosion des décalages culturels, de langage, la remise en cause des légitimités, des vérités. (...)
Laurent Cantet a voulu adapter le roman de François Bégaudeau parce qu'il sonne juste, vrai et se tient loin des vieux cons, tenants de l'école-forteresse, et tout autant des adorateurs de la culture de la rue.
L'un des grands mérites du film est de montrer que l'enseignement est devenu un métier à l'arrache.(...)
Extrait de l’article paru dans Screen Daily N° 1647 - écrit par Lee Marshall
"TRUE CLASS"
Les films peuvent innover de différentes manières. Parfois, ils inventent une nouvelle façon de mettre en scène et de filmer des drames traditionnels, d'autres fois, c'est l'histoire qui est originale alors que la facture du film reste classique.
Mais il arrive exceptionnellement qu'un film permette à ses spectateurs de repenser la narration cinématographique elle-même, sa fonction, ses effets et comment ceux-ci sont générés.
Le film Entre les murs qui a bien mérité se Palme d'Or en est un bon exemple. (...)
"UN MICROCOSME DU MONDE"
Le film traite des difficiles relations entre le débat et les fonctionnements hiérarchiques.(...)
La classe d'Entre les murs est un microcosme représentatif du monde extérieur et le prof, intelligent, drôle et libéral qui préside à cette classe est un homme dont les intentions sont court-circuitées par le système coercitif pour lequel il travaille et par les restes d'un certain snobisme qu'il n'a pas complètement évacué.
(...) Bien qu'il contienne quelques éléments du documentaire, Entre les murs joue avec les genres. (...)
En fait, le film tire son authenticité de ses acteurs : ces vrais collégiens jouent indubitablement la comédie, mais jouent ce qu'ils sont ou une facette de ce qu'ils sont.(...)
"UNE FACON NON ORTHODOXE DE RACONTER UNE HISTOIRE"
Sans prêcher le film apprend au public à s'assoir et à prêter attention, non pas au spectaculaire, mais à tous les micro-drames cachés dans chaque réplique, dans chaque regard.
Source : Résumé de l'extrait de l'article paru dans "Libération"
Sean Penn, président du 61ème Festival International du film à Cannes a voulu surprendre en attribuant la Palme d'Or au film de Laurent Cantet.
En pleine crise de l'école, ce film évoque les difficultés rencontrées par une classe d'un collège de ZEP, mais pas seulement, il montre également de l'intérêt d'enseigner à des jeunes issus de la "diversité". Ce "prix" tant convoité par tant de réalisateurs et de professionnels du cinéma, devrait toucher un monde enseignant démoralisé.
De beaux débats en perspective antre les partisans d'une pédagogie très à l'écoute, comme dans le film, et les tenants d'un enseignement traditionnel.
Mes commentaires sur le film :
Un film juste, réaliste et restant objectif sur le point de vue de chacun des acteurs.
Il fait état d'un système éducatif arrivé en bout de course, essoufflé et inadapté, issu d'une administration rigide et prônant un certain conformisme devenu obsolète de nos jours.
Le film questionne sur le rôle de l'école dans la société française contemporaine, une société issue en partie de la diversité ethnique et culturelle où l'enseignement a parfois du mal à être intégré, compris et assimilé.
Questionnement sur le rôle instructif des professeurs bien souvent dépassés par les événements, pour tomber dans un rôle plus éducatif, où ils doivent sans cesse se repositionner, face à une classe d'adolescents en pleine crise identitaire et en mal de vivre, face à certains parents ne comprenant pas la langue, face à une administration restant condescendante et figée en toute circonstance, comment le corps enseignant en arrive sans cesse à dépasser son rôle de transmetteur de connaissance, pour devenir des éducateurs de la vie quotidienne où il doivent également négocier avec les élèves en "achetant la paix sociale", qui pose certainement un cas de conscience quant aux conséquences de tout cela (ex : exclusion d'une élève qui aboutira à son retour dans son pays d'origine, détention d'un des parents immigrés sans papier arrêtés par la police, etc...).
Face au manque de vocabulaire de certains élèves qui ont du mal à exprimer les sentiments et leur ressenti, la communication prof/élève semble bien souvent difficile mais le film transcende par la sincérité des acteurs, qui jouent leur propre rôle, qui n'ont pas leur langue dans leur poche et ont la réplique facile, sans même parfois réaliser l'utilité de connaître le vrai sens des mots.
Mutisme des élèves, inquiétude des parents, désespoir des profs, incompréhension de l'administration, le film semble nous apparaître comme une révolte contre le système éducatif qui ne donne plus les moyens nécessaires aux différents protagonistes de trouver une issue équitable et juste pour tous.
Excellente démonstration de démocratie, Entre les murs est bien le reflet d'une micro société, faisant état d'une bombe à retardement, où chacun devra certainement en payer le prix.