Photo by Phoebe 26/02/2013 - Berlin, Germany

 

« Analyser le mouvement techno comme un tout est très problématique parce que les courants dont il est composé adoptent des positions esthétiques, idéologiques et économiques complètement opposés. »

 

Ainsi, je ne prétends aucunement analyser un style électronique plus qu’un autre, mais fonctionne surtout selon mes goûts, mes envies et mes aspirations du moment.

En perpétuelle recherche de sons électroniques, éclectiques, novateurs et surtout capables d’entraîner les corps sur le dancefloor, je n’aurais jamais pu penser qu’un jour, je pourrais me balancer aux rythmes du Hardcore.

 

La Techno Hardcore, la violence de la musique industrielle, la finesse du classique

« La musique est bruit, le bruit est parfois musique : ces deux notions s’attirent et se confondent depuis toujours. Le bruit étant la qualification subjective (parfois péjorative) du son. Bruit et son sont les deux faces d’une même réalité. La musique n’est bruyante que pour celui qui l’entend. »

Pour ma part, tout est bruit, tout est son. Le bruit d’un marteau piqueur ou d’une alarme peuvent très bien engendrer une émotion, ou du moins une réaction ; car lorsqu’on y fait un tant soit peu attention, ces sonorités tendent à devenir mélodiques. L’exemple de Björk posant sa voix sur l’alarme d’une voiture ou du groupe Matmos, qui utilise des instruments divers se rapprochant d’un son « chirurgical », nous prouve que notre oreille manque parfois de tolérance, ce qui à juste titre peut être parfaitement compréhensible.

Mélodiquement parlant, le Hardcore a suscité mon intérêt dès lors qu’une nappe mélodique s’est faite entendre, ce qui représente pour moi un contrepoint musical définissant une délicatesse perdue au sein d’un rythme répétitif et empressé et d’une basse saturée, grasse et distordue.

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Bref historique…

Le Hardcore est un style de musique électronique de danse apparue dans les années 90’ et prenant sa source aux Pays-Bas (Rotterdam). Ce style se démarque largement des autres courants électroniques de par sa rapidité (160 à 220 BPM - battements par minute, voire plus pour le Speedcore), dégageant une extrême violence (au sens propre comme au figuré) et utilisant la saturation, ce qui le rapproche des expérimentations ainsi que de la musique industrielle.

La musique industrielle (ou Indus) est un courant musical électronique apparu dans les années 70’ et caractérisé par des dissonances et son importance accordée aux expérimentations sonores, associée également au bruitisme. Elle met en avant les aspects les plus négatifs et les plus lugubres de la société contemporaine, se traduisant par des agressions sonores.

Considéré comme un art transgressif, il s’avère néanmoins difficile de donner une définition précise de l’Indus en tant que genre musical, car les principaux groupes se sont évertués à évincer les étiquettes, afin de les diffuser sous forme d’idées et de concepts artistiques, parfois proches du Dadaïsme. Par conséquent, on parle plus de culture industrielle que de musique, véhiculant les idées omniprésentes de subversion et de transgression.

Le premier titre revendiqué Hardcore est « We have arrived » de Mescalinum United.

Par ailleurs, le style se développe aux Etats-Unis (Detroit et New York) sous l’influence d’artistes tels qu’Omar Santana et Lenny Dee.

D’un point de vue international, le Hardcore semble rester une scène innovante mais ubique.

Genres dérivés (liste non exhaustive) : Gabber, Real Hardcore, Acidcore, Breakcore, Speedcore, Happy Hardcore, Darkcore, Doomcore, Frenchcore, Terrorcore, J-core, Hardstyle, Makina, UK Hardcore…

 

Du bruit, de la distorsion, de la saturation et un kick bien soutenu

La pulsation est le squelette et la signature de la Techno. Ce son agit directement sur le corps, et s’il fallait établir une hiérarchie entre les différents types de sons qui constituent la Techno, ce son serait à la première place. Pas de Techno sans la puissante pulsation apportée par le son de basse, qui donne l’énergie, le tempo, l’envie de danser, le coup de marteau sur la nuque. Il y a un grand nombre de sons de basse, et, parfois le simple fait de trouver un bon son, fait toute la qualité du morceau et surtout toute la différence.

De la finesse dans le Hardcore

Bien qu’ayant que très peu de référence en la matière, je n’en reste pas moins une amatrice, néophyte certes, sachant tout même apprécier une certaine finesse dans le style, ainsi, je reste pointue sur mes préférences musicales. J’ai donc été surprise à me laisser envahir par ces rythmes lourds et entêtants que diffuse la musique Hardcore.

Bien qu’étant DJ, j’aime à me positionner du côté du dancefloor, car avant tout, il est bien question de faire danser les gens. Vision réaliste ou idéaliste, je me propose de vous livrer un petit compte-rendu sur ma propre vision du dancefloor, car ce que je recherche, c’est bien la sensation enivrante que suscite ce genre de soirées, permettant, le temps d’une nuit, de se laisser emporter et de se défouler sur des nappes répétitives et névrotiquement envoûtantes.

 

« La Techno est par définition une musique, donc un bruit parce qu’elle perturbe l’ordre social. »

 

Dans les grandes villes, bien que le bruit y soit omniprésent, celui faisant référence à la Techno en général et au Hardcore en particulier aurait tendance à déranger, à agacer et même, à faire peur ! Il est donc évident que les soirées de qualité se font rares.

Grâce à Ybrid (voir article), je me suis intéressée, il y a quelques années, à la Techno Hardcore, dont je détectais un certain raffinement, au-delà de l’agressivité et de la répulsion ressenties à chaque fois que l’on évoque ce style. Délicatesse que je n’avais pu saisir auparavant, prenant en compte le contexte dans lequel ce genre musical est généralement diffusé.

De fil en aiguille et au gré de mes aventures musicales, je découvris des DJ’s et artistes tels que Liza n’Eliaz, Radium, Hellfish ainsi que des labels tels que Ark Aïk, DNA, mes références restant tout de même limitées sur la question.

Je n’en suis qu’aux prémices de mes recherches artistiques et crépusculaires, et en mon for intérieur, elles se devront d’être pointues et de qualité, car un mix ou un live se doivent, non seulement, de savoir nous raconter une histoire, certes, mais également, savoir capter l’attention de l’audience ; pour ensuite l’hypnotiser et finalement l’emporter dans une transe dont il n’en retirera normalement que des bienfaits. Cette fameuse transe sensée apporter une sorte d’extase de complaisance auditive et cinétique.

Or pour l’instant, je n’ai pu observer, d’une part, qu’il existe une minorité de soirées diffusant du Hardcore, et, d’autre part, les deux derniers dancefloors fréquentés, ne m’ont pas donné l’impression d’un quelconque caractère orgasmique, ce qui ne m’a pas empêché de danser, de passer une bonne soirée et d’y détecter un certain engouement au sein d’un dancefloor, ma foi, assez diversifié et joyeux.

Pour ma part, la musique, quelle qu’elle soit, doit savoir m’emporter dans les hautes sphères du langage du corps. Je souhaite ici mettre en avant le corps, qui est bien souvent effacé au détriment d’une transe latente et statique. Alors que le corps devrait éprouver un défoulement organique et électrisant, surtout sur ce genre de musique.

Dans mon exploration sonore, je me dois donc de rester "open-mind" mais néanmoins exigeante et pointilleuse, appréciant le style tout en recherchant une certaine finesse dans la construction du set/live et des mélodies, associée à un rythme saccadé, voire syncopé, souvent saturé, même véloce. Ce qui me donne l’impression de revenir quelques années en arrière quand je commençais ma collection de disques de Minimale allemande (Kompakt, Sender et surtout BpitchControl).

Et dans ma quête musicale, l’aptitude et la sélection du DJ ou les mélodies du liveur seront à prendre en ligne de compte, permettant d’atteindre une symbiose auditive et corporelle, comparable à la transe escomatique.

 

Le Hardcore reste-t-il une musique de danse ou est-il destiné à une écoute intellectuelle ?

« La danse est le premier né des arts. La musique et la poésie s’écoulent dans le temps ; les arts plastiques et l’architecture modèlent l’espace. Mais la danse vit à la fois dans l’espace et le temps. Avant de confier ses émotions à la pierre, au verbe, au son, l’homme se sert de son propre corps pour organiser l’espace et pour rythmer le temps. » Curt Sachs.

La danse est un mouvement intégré, pratiqué depuis toujours par les êtres vivants depuis le début de la civilisation humaine. Il peut s’agir d’un art corporel, d’un rituel, d’un sport, d’un moyen d’expression ou d’un divertissement constitué d’une suite de mouvements souvent ordonnés ou influencés par le rythme ou la mélodie de la musique entendue ou imaginée.

En cela, le Hardcore constitue une musique de danse, même si elle évoque une certaine révolte, une sorte de rébellion, même si elle est qualifiée d’extrême par ses détracteurs, il n’en reste pas moins la présence du rythme qui transcende le corps au-delà d’une simple écoute. A mon humble avis, elle est capable d’emporter l’esprit et le corps dans une transe psychosomatique, entraînant une déstabilisation et un déséquilibre conscients, proche de la transe chamanique, dans tous les cas, permettant d’atteindre un état de conscience modifié (EMC).

Sans vouloir faire du féminisme de mauvaise foi et m’attachant à dire que le machisme musical me sort par les trous de nez, en tant que femme et DJ, je souhaiterais mettre l’accent sur le fait que nous apprécions la puissance du Hardcore à sa juste valeur et qu’il est très important de ne pas mettre tout le monde dans le même panier !

Voir une jeune femme onduler sur les rythmes durs du Hardcore serait une chose de l’ordre de l’inimaginable pour certains, un plaisir pour les yeux pour d’autres, mais il est à rappeler que nous possédons également un niveau d’écoute au-delà du fait qu’on ne vient pas forcément « fricoter » ou faire les yeux doux aux DJ’s et aux artistes !

Voulant mettre l’accent sur l’esprit festif, sur la danse et le défoulement du corps, l’hédonisme tend à disparaître dans les milieux où la musique tend à se durcir, ce qui me paraît bien dommage. Il est à rappeler que la danse s’est manifestée dans la nature en tant que moyen de séduction et/ou d’expression pour assurer la pérennité du vivant. Présente à travers tous les âges et toutes les civilisations, la danse est également une forme de langage corporel et de communication non verbale.

 

Je n’irais pas jusqu’à dire que celui ou celle qui ne danse pas, ne communique pas, mais j’aurais plutôt envie de dire, sachez observer un corps qui danse et vous saurez certainement à qui vous avez affaire !

 

Phoebe : "Ouvre ton esprit & observe les Multivers!"
Photo by Phoebe 22/02/2014

A SUIVRE…

Sources :

  • Wikipédia
  • Bruyante Techno, réflexion sur le son de la free party - Emmanuel Grynszpan - 1999

 

Mise à jour par Phoebe : 2 Août 2020

Photos (Graffs) by Phoebe 07/10/2011 - France
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