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Réalisation : Quentin Tarantino

Scénario : Quentin Tarantino & Uma Thurman

Année : 2004

Pays : USA

Musique : Robert Rodriguez

Genre : Action

Synopsis : Deuxième opus d’une saga finement et audacieusement réalisée par Quentin Tarantino. La vengeance impartiale d’une tueuse à gage, prête à tout pour retrouver son enfant, thème central du film.


PREGENERIQUE

 

“Tu me trouves sadique… Eh bien, je parie qu’on pourrait faire frire un œuf sur ton front, si on voulait. Ecoute ma grande, j’espère que même maintenant, tu es bien consciente que, il n’y a absolument rien de sadique dans mes actes. Avec les autres guignols, peut-être, je n’dis pas… pas avec toi. Non, ma grande… Là, maintenant, tel que tu me vois, je n’ai jamais été masochiste ».

 

Gros plan en noir et blanc sur le visage ensanglanté de la mariée.

La voix off de Bill fonctionne tel un leitmotiv et constitue un mobile de taille, agencé comme un récit répétitif. Il sert ainsi de raccourci narratif et de résumer concernant le volume 1. Il sert également à la focalisation mentale, engendrant un double-sens.

Le générique est absent et le pré-générique sert d’introduction et de résumé au récit qui le précède.

 

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La séquence suivante, en noir et blanc, fait directement référence aux films d’Alfred Hitchcock, plus particulièrement, à la séquence d’évasion du personnage de Marion Crane dans Psychose (1960).

  

Gros plan sur le personnage tenu par Uma Thurman qui résume la situation en s’adressant directement au spectateur (regard caméra) :

 

« J’avais l’air morte, mais ce n’était pas le cas ! Pourtant, je vous prie de croire qu’ils ont essayé. La dernière balle qu’a tiré Bill m’a plongé dans le coma. Un coma dont j’ai mis quatre ans à me réveiller. Et, revenue à moi, je me suis livrée à ce que les pubs du film ont appelé « une furieuse frénésie de vengeance dans un déchaînement de violence ». une vraie furie ! Je m’suis déchaînée, j’en ai tiré bien des satisfactions. J’ai déjà tué énormément de gens, telle que tu me vois. Mais, il reste le principal… le dernier sur la liste… celui pour lequel j’ai pris la route… et dont la vie ne tient plus qu’à un fil. Car quand je serai arrivée à ma destination… ce sera pour tuer Bill ! »

  

Cette séquence sert d’exposition, raccourci stylistique permettant au spectateur n’ayant pas vu le premier volume de capter en très peu de temps le récit ainsi que la diégèse, c’est-à-dire, l’univers du film.

  

La jeune femme se trouve être une redoutable tueuse à gage sans état d’âme.

Lent travelling avant, le cadre se resserre sur le visage du personnage, la musique s’intensifie au fur et à mesure qu’elle énonce son monologue, entraînant une tension dramatique annonçant un certain suspense.


SEQUENCE 1 : CHAPTER SIX, Massacre à Two Pines

 

Séquence en noir et blanc, exprimant le passé. On assiste à la répétition de mariage. Cette séquence se présente comme le flash back de la deuxième séquence (Chapter 2 : La mariée était en noir) du Volume 1, ainsi, la liaison est faite entre les deux épisodes. C’est également au cours de cette séquence que l’on découvre enfin le visage de Bill.


SEQUENCE 2

 

Retour au présent. Dialogue entre Bill et Budd, on apprend qu’ils sont frères et qu’une vieille discorde les a séparés. Bill est venu prévenir son frère que Black Mamba se prépare à le tuer.

Le MacGuffin énuméré par le "BIP" maintient le mystère autour du nom de l’héroïne. Cet effet a pour conséquence de réveiller la curiosité du spectateur et d’engendrer un bon nombre de questions sur la narration. Dans cette séquence, l’intrigue se met peu à peu en place et nous permet néanmoins, de découvrir le personnage de Budd.


SEQUENCE 3 : CHAPTER SEVEN : The lonely grave of Paula Schultz (La tombe solitaire de Paula Schultz)

 

Black Mamba est bel et bien venue pour tuer Budd mais elle se fait surprendre par ce dernier, ce qui rajoute un brin de suspense à l’action. Ici, le cinéaste joue sur les espaces et la relation qu’ils entretiennent avec les personnages. Après avoir capturé Black Mamba, Budd contacte Elle Driver, qu’il surnomme à juste titre « la teigne ». Budd en profite pour négocier une forte somme d’argent contre l’exécution de Black Mamba ainsi, il n’hésite pas à monnayer son sabre, qui semble refléter une valeur affective dans le récit.

 

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« Je te remettrai le meilleur sabre qui n’est jamais été forgé par un homme ».


L’importance du sabre est capitale, car il possède une forte valeur symbolique, de par sa rareté, il est inestimable. Rappelons que le film s’inscrit, entre autre, dans la tradition du film de samouraïs.

  

Budd s’apprête à enterrer vive Black Mamba, un enterrement peu conventionnel, "à la texane", comme il le précise. Cette scène est assez cruelle et laisse présager que tous les protagonistes ont évolué dans un univers sans foi, ni loi. La situation s’en réfère à un cloisonnement, engendrant une sensation de claustrophobie, l’étau se resserre sur le personnage principal, tout espoir semble vain…


SEQUENCE 4 : CHAPTER EIGHT : La cruelle tutelle de Paï Meï

 

Cette séquence agit en citation et fait explicitement référence à la fameuse série dans laquelle David Carradine (1936-2009) tenait le rôle principal : Kung Fu.

 

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Black Mamba et Bill sont assis autour d’un feu, ce dernier se met à lui raconter une histoire.

 

« Il était une fois, en Chine, pour certains, ce serait autour de l’an 1003 de notre ère, un grand prêtre de l’ordre du Lotus Blanc nommé Paï Meï, marchait sur la route, percevant tout ce qu’un homme disposant des immenses pouvoirs dont disposait Paï Meï peut percevoir. Autant dire qu’on ne saura jamais ce qu’il percevait. Lorsqu’apparu soudain sur la route, venant dans le sens opposé, un moine de Shaolin. Quand le moine et le prête arrivèrent à la même démonstration de sa générosité, salua le moine d’un léger hochement de tête… Lequel ne lui fût pas rendu. Le moine avait-il intentionnellement insulté Paï Meï ou n’avait-il pas remarqué ce geste de sociabilité. Les intentions du moine demeurent inconnues. Ce qui est connu, ce sont les conséquences. Le lendemain matin, à Shaolin, Paï Meï se présenta à la porte du temple et demanda au père supérieur de ce temple qu’il lui offre immédiatement sa tête, pour réparer l’insulte. Le supérieur commença par  essayer de raisonner Paï Meï et de se rendre à l’évidence, Paï Meï était intraitable. Ainsi débuta le massacre des soixante moines du temple de Shaolin qui périrent ce jour là, foudroyés par le Lotus Blanc. Car, Paï Meï, selon la légende, avait employé la technique des cinq points et la paume qui font exploser le cœur, la frappe la plus foudroyante de tous les arts martiaux. Il te frappe du bout des doigts évidemment, en cinq différents points de pression, très précis… et puis, il te laisse t’éloigner. Et il suffit que tu fasses cinq pas pour que ton cœur explose à l’intérieur de ta poitrine et que tu t’écroules sur place… foudroyé ».

  

Retour au présent, l’héroïne parvient, grâce à l’enseignement qu’elle a reçu, à sortir du cercueil dans lequel elle a été enfermée. Léger clin d’œil aux films de zombis lors de sa sortir de terre.


SEQUENCE 5 : CHAPTER NINE, Elle et moi

 

Le personnage principal est en train de traverser le désert afin de poursuivre son but. Le plan d’ensemble ainsi que la musique de Sergio Leone rappellent le western spaghetti.

  

Pendant ce temps, Elle Driver et Budd sont sur le point de conclure un marché : l’échange du sabre de Black Mamba : objet qui fonctionne tel un fil conducteur ; le sabre reste l’objet de toutes les convoitises. Mais la traîtrise d’Elle n’a d’égal que la cupidité de Budd qui se laisse surprendre par les morsures d’un serpent qu’elle avait dissimulé. Budd agonise pendant qu’Elle lui balance un petit exposé, préparé tout spécialement à son attention.

 

Elle, sur un ton narquois, professoral et un rien sarcastique, s’adresse à Budd en ces termes :

 

« Pardon Budd, je manque à tous mes devoirs. Budd, je te présente mon ami le black mamba. Black mamba, c’était Budd. Tu sais comment on s’est rencontrés ? J’l’ai commandé sur internet ! C’est une créature fascinante, le black mamba. Ecoute ça ! En Afrique, on dit que, dans la brousse, l’éléphant tue, le léopard tue et le black mamba tue. Mais ce n’est qu’avec le black mamba, et c’est bien connu en Afrique, c’est tout sauf une fable, que le décès est assuré, d’où son surnom « d’annonciateur de l’agonie ». Trop cool, hein !? Son venin neurotoxique est le plus efficace des poisons. Il agit sur les nerfs et provoque une paralysie générale. Le venin du black mamba tue un être humain en environ quatre heures, si celui-ci a été mordu à un doigt ou à une jambe. En revanche, une morsure au visage ou sur le haut du corps, peut entrainer la mort en moins de vingt minutes. La suite te concerne, écoute bien… La quantité de venin qui est libérée dans une morsure peut être gargantuesque. C’est un mot que j’adore, « gargantuesque », on a rarement l’occasion de le placer dans une conversation. Si on ne dispose pas d’anti-venin, dix à quinze milligrammes sont une dose fatale pour un homme. Alors que le black mamba injecte généralement au moins cent et souvent quatre cents milligrammes de venin par morsure à sa victime ».

 

La relation entre le serpent, animal dangereusement venimeux et mortel et le nom de code du personnage central, tueuse à gage sans pitié, est évidente. A travers la métaphore du reptile (black mamba), Budd a succombé aux morsures de la créature.

  

Mise en abyme à travers le dialogue : Tarantino use audacieusement de ce procédé en faisant référence au dialogue et au « parler beau » dans les films.

 

Elle Driver exprimera son regret de ne pas avoir eu l’honneur de se mesurer à sa plus grande rivale. Et c’est également à ce moment précis de l’histoire que l’on apprend enfin le véritable nom de Black Mamba alias, Beatrix Kiddo. Cette dernière débarque soudain, créant un effet de surprise et c’est alors qu’un duel acharné s’engage, dont l’issue ne pourra qu’être la vie pour l’une et la mort pour l’autre. Ici, l’accent est mis sur le fait que ce ne sont plus de simples femmes qui se livrent un combat mais de véritables tueuses sans merci, dans un esprit de vengeance dont la finalité ne peut être que la mort.

  

Le combat s’interrompt un court moment lorsque Beatrix retrouve le sabre de Budd, s’adressant à son adversaire, lui demandant pourquoi Paï Meï lui a arraché l’œil. Elle, personnage arrogant, cynique et hargneux avait traité son maître de vieillard pitoyable, borné et gâteux. Sa maladresse lui aura coûté son œil. Jubilant, Elle avoue avoir empoisonné Paï Meï par vengeance.

Cette annonce constitue une double raison pour que le personnage d’Elle Driver soit éliminé ; son destin demeura funeste, elle finira avec l’autre œil arraché.


SEQUENCE 6 : LAST CHAPTER, Face à face

 

Le dénouement approche et le personnage est sur le point d’achever sa quête : va-t-elle retrouver Bill et tenir la promesse qu’elle s’est faite : tuer Bill ?

 

Citation : Le facteur sonne toujours deux fois (The Postman always rings twice, Tay Garnett, 1946), faisant référence à la blondeur de l’actrice qui jouait dans le film, Lana Turner.

 

Cette citation renvoie également au mythe d’Alfred Hitchcock, cinéaste qui, disait-on, avait un goût prononcé pour les actrices blondes.

 

Le spectateur découvre enfin qui est vraiment Bill, qui se présente comme un homme manipulateur. Sa haine pour Beatrix n’a d’égal que l’amour inconsidéré qu’il lui porte. Bill se présente comme un personnage cruel et possessif, jouant énormément sur l’affect, ce qui ne l’empêche pas d’être réaliste. Bill lui avoue indirectement, être éperdument amoureux d’elle, conscient et regrettant l’acte odieux qu’il a commis et il est également conscient du fait qu’il sera obligé de l’affronter. Mais il ne compte pas se laisser faire aussi facilement et exige des aveux en lui injectant un sérum de vérité qu’il prénomme « le grand révélateur des secrets ».

 

Puis, Bill se lance dans un laïus à propos des super-héros. Cette référence est assez intéressante d’un point de vue narratif, car il renvoie directement à une forte symbolique régissant l’univers : la nature humaine. Et c’est à travers le personnage de Superman et de son alter ego, Clark Kent, que Bill fait la relation entre ce personnage fictif qui fait la critique de toute l’humanité et Beatrix Kiddo, guerrière invétérée et combattante hors pair, alias Black Mamba, née pour être tueuse à gage. La signification est lourde de sens : on n’échappe pas aussi facilement à son destin. Alors que l’héroïne enceinte voulait protéger l’enfant qu’elle portait, Bill n’ayant pas accepté le fait qu’elle disparaisse, s’est vengé d’elle en lui logeant une balle dans la tête. Quant à Beatrix Kiddo, son seul but était de vivre une vie paisible tout en élevant sa fille.

 

La femme la plus dangereuse du monde souhaitait déposer les armes car elle s’inquiétait pour l’avenir de son enfant. Quoi qu’il en soit, une femme restera une femme, procréatrice engendrant la vie et non la mort.

La thématique de la mort est omniprésente dans la narration : Beatrix doit en finir avec Bill qui succombera à l’attaque foudroyante de la technique des cinq points et la paume qui font exploser le cœur.

La musique annonce la conclusion (Sergio Leone). Bill meurt en toute dignité car il a affronté une adversaire de taille.


SEQUENCE 7 : Dernière séquence et conclusion

 

Beatrix Kiddo a atteint son objectif ; libérée du poids énorme de la vengeance, elle peut continuer sa vie de femme en élevant son enfant.

 

Citation : « La lionne a retrouvé son petit et la paix revient dans la jungle ».

 

On ne s’attaque pas à un prédateur sans en subir les conséquences.


Conclusion

 

Finalement, au-delà d’un film d’action, Kill Bill reste un film humaniste, aux nombreuses références cinématographiques. A travers le thème du samouraï, le cinéaste rend un hommage évident à la femme et à son esprit combatif, à sa bravoure, dotée d’un instinct de survie au-delà de toute imagination et d’une rage de vaincre (et de vivre) difficilement quantifiable, si ce n’est à travers cette histoire de vengeance qui renvoie directement à la nature profonde de l’être humain.


A suivre, analyse filmique :

  

Kill Bill pourrait-il être considéré comme un road-movie contemporain ?

Le film aurait-il eu le succès qu’il a remporté si les personnages n’avaient pas été des femmes ?


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