LE HARDCORE SE RÉSUME-T-IL A LA PULSATION ET AUX BASSES ?

 

« L’extrémisme musical du courant Hardcore est une exacerbation du noyau dur de la Techno mais en aucun cas le cœur de la scène techno. Bien au contraire, il en est l’une des extrémités et entretien des rapports ambigus avec le reste du mouvement ».

 

Samedi, le jour idéal pour passer une soirée en club. Une activité humaine et contemporaine : tout le monde va en soirée, pour passer un bon moment, pour se défouler, quelle que soit la raison, les soirées sur Paris, ce n’est pas ce qu’il manque, le plus difficile est de choisir LA soirée qui ne vous fera pas regretter d’avoir fait l’effort de pointer le bout de son nez à l’extérieur !

Dans chaque ville, il existe une « shounga », littéralement, la boîte de nuit commerciale du coin, et, Paris ne déroge pas à la règle ! Je n’ai pas pour habitude d’écrire des impressions négatives sur les soirées que je fréquente, et pourtant, je pense qu’il est parfois nécessaire de remettre les choses à leur place et d’arrêter de se voiler la face en ce qui concerne le monde de la nuit parisienne et tout ce qui gravite autour. Entre mythe et réalité, le désenchantement n’est pas bien loin.

Tout d’abord, Pigalle n’est pas un de mes lieux préférés de la capitale et je n’ai jamais compris ce qui pouvait en faire un lieu touristique, mise à part le Musée de l’érotisme, je n’y vois pas grand intérêt de s’y promener ! Le quartier déborde de sex shop et de boutiques de souvenirs bon marché…

L’extérieur de La Machine du Moulin Rouge (Ex-Locomotive) est un admirable trompe-l’œil, qui attire et qui en met plein la vue. Nul doute sur le succès public de ce club, mais à l’intérieur, il est comparable à n’importe autre club : vente d’alcool à des prix prohibitifs, aquarium pour fumeurs en délire, trois salles proposant trois styles de musiques différents pour assouvir la demande du client venu dépenser son argent pour le week-end. Un bar à bières qui n’a rien de féerique, à en juger par la présence rébarbative des vigils déambulant et traquant le moindre pépin susceptible de ternir la soirée. Le seul avantage, l’espace et le dancefloor central agrémenté d’un sol en parquet, idéal pour transmettre les vibrations !

 

« La musique n’a d’autre nom que les résonances qu’elle crée en toi ».

 

Dans le cas du Hardcore, la musique est particulièrement envahie par le bruit, le son sale et les rythmiques les plus agressives et obsessionnelles. Agression et lobotomie auditives, est-ce bon pour le moral, pas vraiment ! De là à payer pour subir, je ne suis pas d’accord.

Pour Kassav’, le zouk, en l’occurrence, la danse, serait le meilleur médicament pour nous, hélas, je n’ai pas encore trouvé le bon remède !

Le Hardcore (Hardstyle, Gabber) ne possède pas de répétition régulière de la pulsation, d’où son caractère moins dansant dû aussi à une certaine imprévisibilité déconcertante pour les danseurs habitués à suivre une pulsation régulière confortable.  Alors comment être emportée dans les tourbillons magiques que peut procurer un orgasme quand la musique « break » toutes les soixante secondes ? C’est comme être coupé dans son élan au départ d’un sprint, parce que l’un des participants aura fait un faux-départ.

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La Machine du Moulin Rouge peut se targuer de posséder un très bon système de sonorisation mais devrait réviser ses leçons avant de balancer une horde de décibels engendrant une saturation insupportable pour qui se tiendrait à quelques mètres de la scène. En outre, ce n’est pas le Hardcore qui m’a assassiné les oreilles, c’est l’amplification excessive du volume qui m’a percé les tympans !

Les organisateurs seraient-ils capables de mettre leur cupidité de côté afin de nous proposer de la musique ainsi que des artistes dignes de ce nom ?!

« Reality used to be a friend of mine ! » - P.M. DAWN

Payer pour se faire chier, un tout nouveau concept ! S’en foutre plein les oreilles et dépenser l’argent qu’on n’a pas ! Ici, le dancefloor aura fortement été galvanisé par des sonorités bruyantes et extrêmes mais pour le pointu, on repassera ! Un public présent, assez jeune et éclectique pour du Hardcore pas aussi original que j’aurais pu le penser. Encore une fois, ce jugement n’engage que moi et moi seule…

Une soirée tant attendue, ma foi, fort décevante, car la transe orgasmique n’était pas au rendez-vous, à moins de s’être gorgé de diverses substances psychotropes, la pauvreté musicale a montré le bout de son nez au sein d’un milieu pas si mythique que ça.

Consciente du fait qu’il ne faut pas confondre démarche artistique et démarche commerciale, il faut tout de même arrêter de prendre les gens pour des imbéciles incultes !

 

Exploration électronique : Le Hardcore (suite)

Le cloisonnement des genres est le résultat d’un sectarisme de la part des musiciens comme du public, un problème qui concerne toutes les musiques. Le propre du musical étant d’échapper aux mots (aux clichés, aux stéréotypes ainsi qu’aux idées reçues) et de pouvoir traverser les cloisons, il est simple pour un DJ de passer progressivement, par le mix, d’un style à un autre, aussi éloignés soient-ils. Ici, la démarche du DJ est de jouer une musique plus difficile (et elle l’est !), suggérant une écoute plus mentale que corporelle, effaçant par la même occasion la danse et l’hédonisme.

« Cette bande sonore est ancrée dans une perspective idéologique : une musique Hardcore pour un monde Hardcore ». Mark Harrison, Spiral Tribe.

Les puristes ont une définition très restrictive du mot « hardcore », limitée à une techno composée de sons toujours saturés, sales, sans pulsation régulière ou bien ultra-rapide, peu propice à la danse et extrêmement agressive.

 

Le bruit désiré

Le bruit est l’ensemble de l’univers sonore. La nature ne produit que du bruit, seul l’homme est capable de produire le son musical, à l’exception notable des oiseaux et des mammifères marins, auxquels l’Homme reconnaît parfois cette capacité. Le son musical est en revanche, selon la musicologie traditionnelle, une mise en ordre du sonore de laquelle est exclu le bruit. Etre perpétuellement dérangé par le chant des oiseaux et être apaisé par la musique techno reste du domaine du paradoxal : les basses ont la réponse !

En tant que désordre, chaos, le bruit est donc l’ennemi du bien dans le cadre social. La nécessité d’ordonner le social conduit l’homme à chasser le désordre de sa création et par conséquent le bruit. Le bruit, s’il est employé, ne peut que signifier un désordre, un acte contre l’ordre social en place. Le Hardcore est un jaillissement de bruit, une poche de révolte qui se déverse par l’intermédiaire du sonore, récupérée par l’industrie mercantile du disque afin d’être intégré par les réseaux de distribution et est devenu malgré son aspect contestataire, une musique com-merde-ciale.

 

Source : Bruyante Techno, réflexion sur le son de la free party - Emmanuel Grynszpan - 1999

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