LE CINÉMA DE HONG-KONG # 2
LE CINÉMA DE HONG-KONG # 2

LES RÉALISATEURS


LIU CHIA-LIANG

 

Liu Chia-liang (1936-2013) était un réalisateur, acteur et chorégraphe martial, né à Canton (Chine).
Son père Liu Cham a été disciple de Lin Shirong (maître de Hung Gar). Ce dernier fût le plus célèbre des disciples du Maître Wong Fei-Hung.

Liu Chia-liang commença sa carrière dans le monde du cinéma en devenant cascadeur, puis directeur des combats au sein de la Shaw Brothers, où il s'occupait de chorégraphier les séquences de combat sur les films de Chang Cheh avant de se lancer lui-même dans la réalisation. En 1975, il réalise son premier film « Wang Yu défie le maître du karaté » (VA : « The Spiritual Boxer »).

À l'inverse de Chang Cheh, dont les films se caractérisaient par leur violence, les films de Liu Chia-liang revenaient à la source des arts martiaux pour mieux les mettre en valeur sur les plans athlétique et philosophique.
Il réalise la trilogie culte sur Shaolin :

 

  • « La 36ème chambre de Shaolin » (1978)
  • « Le Retour à la 36ème chambre » (1980)
  • « Les Disciples de la 36ème chambre » (1985)

 

Dans le film « Les Démons du karaté » ou « Shaolin contre Ninja » (VA : « Heroes of the East ») qu'il réalise en 1978 (sortie en France en 1982), il oppose les arts martiaux chinois et japonais.
Il met également en scène des comédies kung-fu avec « Le Prince et l'arnaqueur » et « Le Singe fou du Kung-Fu » (1979).

Les films de Liu Chia-liang reflètent l’évolution des films d’action chinois. Il a également dirigé les combats sur de nombreux films cantonais.
Cf. « Huang Fei-Hong : The Incredible success in Canton » (Wong Fung, 1968, Hong-Kong)


Liu Chia-liang était l’héritier de la troisième génération de Wong Fei-Hung et ce dernier a eu pour disciple Lam Sai-Wing, dont le disciple Liu Chang était le père de Liu Chia-liang, lui-même héritier et authentique maître de l’Ecole de Shaolin du Sud.


Ce que l’on remarque dans toutes les actions qu’il déploie en tant que réalisateur, c’est qu’il les avait déjà utilisées quand il était avec Chang Cheh, mais pas aussi minutieusement. Quand il est devenu maître de ses films, il a exploité ses propres qualités martiales en montrant le meilleur des arts martiaux.
D'ailleurs, Liu Chia-liang était un réalisateur qui prenait très au sérieux les arts martiaux et le cinéma, et surtout concernant les films d’arts martiaux. Il eut une longue carrière de cascadeur et de chorégraphe, ce qui lui a permis d’apprendre le cinéma. Quand il s’est mis à réaliser ses propres films, il a su comment filmer les arts martiaux et comment marier le cinéma et les arts martiaux. Il a également créé son propre style dans les arts martiaux. Sa façon de combattre est centrée sur le mouvement du bras et du poing, ce qui est caractéristique de l’Ecole du Sud, alors qu’avec l’Ecole du Nord, on se concentre plus sur les coups de pied.
Cf. « 2 Héros », chorégraphie par Liu Chia-liang, réalisé par Chang Cheh (1974)
Par ailleurs, on retrouve Liu Chia-liang dans le film de Wong Kar-wai « The Grandmaster » (2013), nous donnant encore une fois une belle démonstration de son art qu'il porta au plus haut niveau.

 

LA DIFFÉRENCE ENTRE LIU CHIA-LIANG ET CHANG CHEH ?

Elle est considérable, même si ces deux cinéastes voulaient propager les arts martiaux et les faire connaître.
Si on regarde les premiers films d’arts martiaux de Chang Cheh, tout le corps est en mouvement. Il ne montre pas les coups de pied. C’était avant les films de Bruce Lee.
Chang Cheh préférait montrer les héros en train de combattre en plan large et en plan moyen. Quand il voulait montrer la force du héros, il se concentrait sur le mouvement de la main, la liaison entre le bras, le poing, la rotation du poignet. Il montrait cette liaison avec le corps car il voulait montrer l’intérêt visuel que cela apportait devant la caméra.
Chang Cheh accentuait le côté loyal de ses héros. Dans ses films, il y avait beaucoup de sang, contrairement aux films de Liu Chia-liang.
Cf. « Frères de sang » de Chang Cheh (Hong-Kong, 1973, Wu Xia Pian)


Chang Cheh voulait montrer l’héroïsme et Liu Chia-liang, l’éthique martiale. L’éthique martiale connote la raison, une façon de vaincre par la vertu. Chang Cheh, lui, soulignait l’héroïsme de ses personnages.
C’est à ce niveau que ces deux réalisateurs sont très différents. Leur point commun, c’est qu’ils utilisaient le cinéma pour montrer le Kung-Fu.
Liu Chia-liang a tourné beaucoup de films sur le héros Wong Fei-Hung qui était originaire de Shaolin.

D'une manière générale, les producteurs et les réalisateurs se sont interrogés sur la manière de montrer le Kung-Fu afin d’innover et d’éveiller la curiosité du spectateur.

Cf. « Le Combat des Maîtres » (VA : « Challenge of the Masters » ), film réalisé par Liu Chia-liang en 1976 (sortie en France en 1985).
Dans ses films, le cinéaste mettait le Hung Gar en avant avec des personnages tels que Hung Hsi-Kuan et Wong Fei-Hung.
L’esprit de l’Ecole Hung transparaissait dans ses films. Il fallait exprimer ce qui est le plus important dans la boxe Hung : la vertu des arts martiaux. Avoir du cœur importe plus que de se battre. Il faut avoir la vertu, qui est issue de la philosophie confucéenne.


Apprentissage versus vengeance

« Les Exécuteurs de Shaolin » (VA : « Executioners from Shaolin » ; VO : « Hong Xi Guan »), réalisé par Liu Chia-liang en 1977, est l’un des meilleurs films sur Hung Hsi-Kuan.
Dans ce film, pour le réalisateur, la vengeance n’est pas importante. Le plus beau chez Liu Chia-liang, c’est ce qu’il se passe durant le film : l’entraînement.

Son originalité tient dans sa façon de montrer la pratique du Kung-Fu. La plupart des films issus du Wu Xia Pian parlaient de vengeance, pas seulement dans les films de Chang Cheh, mais également dans ceux de Wang Yu.

Pour Liu Chia-liang, le moment le plus important, c’était vraiment l’entraînement, qui apparaissait comme une sorte d'initiation. Dans les films plus anciens, les réalisateurs s’attardaient beaucoup moins sur l’entraînement, ce que soulignait Liu Chia-liang dans ses films et c’est ce qui a surpris tout le monde.


Fiction ou réalité ?

Dans le cinéma chinois, la première référence à Shaolin serait « L’Incendie du Monastère du Lotus Rouge » (VO : « Burning The Red Lotus Temple »), un vieux film muet en noir et blanc, réalisé par Zhang Shichuan . Ce film est adapté du roman de Xiang Kairan, « Le Conte d’un Maître d’armes extraordinaire » (VA : « The Tale of Extraordinary Swordsman »). C’est également un des plus longs films jamais produit dans l’histoire du cinéma. D’une durée totale de 27 heures, il fut découpé en 18 longs-métrages, projetés entre 1928 et 1931.


A l’époque, Shaolin était considéré comme le berceau mythique des arts martiaux. Mais on ne montrait pas le style Shaolin comme on peut le voir maintenant, avec le style de la Grue ou celui du Tigre.
Dans les arts martiaux, le Bouddhisme apparaissait comme une chose mystique. Ceux qui étaient bouddhistes étaient fiers d’être originaires de Shaolin. Même dans les formes les plus ésotériques, tous les arts martiaux proviennent de Shaolin. Ce qui a vraiment permis de faire connaître Shaolin au grand public, c’est « La 36ème chambre de Shaolin », film hong-kongais, réalisé en 1978 par Liu Chia-liang.
Le cinéaste voulut démystifier les héros de combat, car jusque-là, ce type de personnage était devenu une tradition dans des films comme « Le Justicier de Shanghaï » (VA : « Boxer From Shantung ») (1972).
Généralement, au début du film, le héros est un maître de Kung-Fu et le sujet est la vengeance, la fin du récit montre comment il tue tout le monde.


« La 36ème chambre de Shaolin » (Lui Chia-liang, 1978) est un film qui montre plutôt Shaolin sous toutes ses facettes.
D’une certaine manière, aucun de ces films ne s’inspire de la réalité, car les arts martiaux sont par définition des arts de la fiction et ne s’inspirent pas forcément de la réalité. Mais il existe tout de même une réalité philosophique, celle du confucianisme et du bouddhisme, dans un contexte historique typiquement chinois.
Les personnages des films de Liu Chia-liang sont plus proches du héros traditionnel des arts martiaux que les personnages mis en avant par Chang Cheh, dont les héros sont très proches de Hong-Kong de la fin des années 60 et du début des années 70.


A SUIVRE : Analyse cinématographique : « La 36ème chambre de Shaolin » (1978), « Le Retour à la 36ème chambre » (1980), « Les Disciples de la 36ème chambre » (1985).


Sources :
Internet
La trilogie de la 36ème chambre de Shaolin - DVD bonus
 

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